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  • Vladimir Ghika : le sens de la destinée humaine

    [ 89] Un trop grand nombre de nos contemporains se représentent Dieu comme un tyran tout-puissant, comme un potentat impitoyable qui use et abuse de sa toute-puissance pour mettre ses créatures à son service, les réduire en esclavage, les soumettre à ses règlements.  Il est urgent de leur rappeler que le christianisme est la révélation que Dieu nous aime, que les anges ont chanté  la nuit de Noël la déclaration d'amour de Dieu aux hommes : " Paix aux hommes qui sont aimés de Dieu" (littéralement : Paix aux hommes à qui Dieu veut du bien, et non, selon une mauvaise traduction : Paix aux hommes de bonne volonté). Mgr Ghika vivait dans un émerveillement perpétuel devant l'Amour infini de Dieu pour nous et rappelait sans cesse que Dieu n'est pas un tyran ou un potentat, qu'Il est l'Amour infini qui Se donne entièrement par amour.


    [90] C'est d'abord par amour que Dieu nous crée : tout ce qu'il y a d'être en nous est don de son amour. Les Pensées pour la suite des jours nous le disent (p.149) : " Nous sommes aimés aussi fortement que nous sommes créés." A ceux qui se croient le jouet d'une fatalité aveugle, le même livre rappelle qu'à l'origine de toutes choses il y a une Volonté d'amour qui crée par amour des hommes pour les aimer et être aimé d'eux : " Un Dessein, point un Destin, voilà, nous l'avons appris, le fond de toutes choses. Et depuis Jésus, nous savons qu'il n'y a pas d'autre Destin que l'Amour " (p.73) Notre foi est d'abord de croire cela.  (...)

    [91] "Dieu nous aime d'un amour infini, incessant, éternel...Nous avons notre place de choix dans l'amour universel de Dieu - ce fond de toutes choses... N'avez-vous pas compris sur quoi se fonde l'Univers ? Le monde est fait sur un plan d'amour. C'est l'alpha et l’oméga, la fin suprême qui est le commencement de tout et le milieu de toutes choses. Rien n'est fait en dehors de cette pensée, et qui s'en pénètre commence à connaître Dieu et le monde. En cet amour universel, il y a un amour spécial, encore multiplié, pour nous, les créatures qui peuvent et doivent Le connaître, Le servir et L'aimer - pour nous nominalement, ces élus de tel jour, de tel mois, de telle année, de tel lieu... avec les siècles d'histoire divine qui se placent, entre nous, longue suite de choses et long récit d'amour. Et cet Amour qui est un Amour infini, un Amour éternel, c'est le plus prouvé des amours. Voici venir à travers les âges les paroles et les actes et les sacrifices que nul ne peut compter - la conscience naturelle de la créature qui proclame l'Amour créateur - la voix de  Dieu dans les Livres saints, les œuvres de Dieu, son Église éternelle, tout le grand dialogue de l'Amour suprême et de ce qu'il daigne aimer. Il faudrait reprendre pour cela l'histoire entière du monde, de l'humanité et de toute [92] âme humaine. J'appelle votre réflexion à se fixer souvent sur ce domaine presque sans limites dont le centre est la venue par amour au milieu de nous du Sauveur."

    Ceux qui sont frappés par la souffrance ont souvent plus de mal à admettre que Dieu les aime. C'est pour eux que Mgr Ghika a écrit ce qui suit : " Que me veut le Seigneur qui vient dans la nuit et qui frappe ? Il veut que tu comprennes qu'Il t'aime et qu'Il t'aime plus que tous ceux qui t'aiment et plus que toi-même tu ne saurais t'aimer. Il veut que tu veuilles ce qu'Il veut parce qu'Il veut ton bonheur éternel, complet, parfait. Il veut que tu acceptes avec la révélation de son Amour les maux qui viennent  jusqu'à toi si tu dois les subir ; que par la force de son Amour tu les repousses si le souverain pouvoir de la prière et de la grâce doit te les faire éviter ; que, dans son Amour, ces maux, quels qu'ils soient, tu les unisses aux trésors de la Rédemption, aux puissances qui sauvent l'univers ; que pour son Amour tu ailles jusqu'à les rechercher s'ils peuvent procurer le bien du monde et la gloire de ton Dieu. Si tu es coupable et que tu me sentes battre dans la souffrance [93], moi le Cœur de ton Dieu, sois lavé par ta douleur, dans le Sang divin, des peines sorties de ta faute. Si tu es imparfait, sois régénéré. Si tu es bon, sois meilleur."

    L'Apôtre du XXe siècle Monseigneur Ghika - JEAN DAUJAT- Nouvelles Editions latines 1962

  • Vladimir Ghika et la présence trinitaire en nous

    (...) Mais bien plus grand encore était l'émerveillement de sa foi devant la présence surnaturelle des Trois Personnes divines comme hôtes intimes et familiers des âmes en état de grâce : il vivait dans la compagnie constante du Père, du Fils, et du Saint-Esprit présents au plus profond de son âme par la grâce et il les retrouvait dans chaque "prochain" que la Providence lui faisait rencontrer. Il ne se lassait pas d'attirer l'attention sur cette vie de la Divine Trinité en nous à laquelle, hélas ! la plupart des hommes sont si peu attentifs.

    Il ne se lassait pas de s'adresser à cette vie de la Trinité au fond de l'âme de ses auditeurs ou de ses lecteurs, comme il nous l'explique dans "La Sainte Vierge et le Saint Sacrement" (p.33) : " Ce à quoi je fais appel ici, ce n'est pas à l'attention bien disposée d'une assistance, mais à la vie de la Sainte Trinité, à la vie prodigieuse du Dieu vivant à demeure en nous, grâce à la présence réelle et vivifiante du Verbe incarné qui a traversé ce matin votre être et le mien, à cette vie de la Trinité Sainte qui réside en vous tant que le péché ne l'a pas chassée, à toutes ces réalités premières et souveraines qui ne peuvent passer et vis-à-vis desquelles nous avons le seul tort de ne jamais assez reconnaître leur prééminence absolue et leur toujours actuelle vertu (...)

     

    Jean Daujat - L'apôtre du XXe siècle Monseigneur Ghika - Nouvelles Editions latines 1962 p. 70

  • Paroles de Vladimir Ghika (14)

    A bien des tournants de notre vie, prendre une décision importe plus que de prendre la meilleure.


    Quand ton âme s'oriente vers Dieu, tu entraînes à sa suite, en même temps que les invisibles présences d'un autre monde, la trace et le lien d'une étroite parenté avec toutes les choses créées - et cette universelle compagnie qui tient à toi, se trouve du même coup, en toi, bénite comme toi.


    Trouver dans le malheur d'autrui quelque allégement à sa misère, est la marque même de ce qui fait l'Enfer et remplace là-bas la communion des Saints.


    Le remords est comme un "espoir retourné" et sans issue. Il plonge en un passé dont il voudrait refaire un avenir, ou tout au moins un malléable présent.


    La façon dont Dieu nous dit de l'aimer...ce n'est pas : "Aime-moi, sinon..."


    Dans les choses de Dieu, les seuls à savoir vraiment, ce sont ceux qui aiment.


    Nous n'aimons pas Dieu comme il faut, si nous ne savons pas, en L'aimant Le faire aimer.



    Vladimir Ghika - Pensées pour la suite des jours - Beauchesne 1936.


  • Paroles de Vladimir Ghika (13)

    Dans le plan divin, nulle rencontre n'est indifférente, et là peut encore s'exercer cette vertu aux occasions maintenant trop périmées, cette vieille vertu de l'hospitalité.


    S'il t'est donné de choisir tes compagnons de labeur, recrute-les parmi ceux qui travaillent en chantant.


    Avant de juger pense à ceci : si l'on jugeait le bien que j'ai fait de la façon dont je juge le mal que font les autres ; si l'on jugeait le mal que j'ai fait de la façon dont je juge le bien que font les autres, sous quelle figure cela se présenterait-il ?


    Penser à Dieu, c'est du même coup être sûr de n'oublier personne. Oublier Dieu, c'est être sûr de léser le monde entier.


    Beaucoup ont besoin de succès pour mener à bien l’œuvre de Dieu : quelques-uns savent ne pas le requérir pour avancer ; d'autres, plus rares, trouvent jusque dans l'insuccès un moyen de mieux prouver à Dieu leur amour.


    Pas plus que des hommes nous ne devons être les usuriers des circonstances.


    Bénis et honore ton insuccès. Il te montre la beauté, la grandeur, la dignité de l'objet au-dessus de ton effort et de toi-même. Et n'y vois pas seulement une raison d'humilité, mais savoures-y la joie désintéressée d'un amour du trop haut dans le Très-Haut.



     Vladimir Ghika - Pensées pour la suite des jours - Beauchesne 1936.


  • Paroles de Vladimir Ghika (12)

    L'autre monde n'est pas l'arrière-boutique de celui-ci. Trop de gens semblent l'envisager ainsi. Et ce monde n'est que l'antichambre de l'autre. Trop de gens semblent l'oublier.


    La Sainte Hostie nous apporte, après l’Évangile de la Parole, l’Évangile du Silence. Et c'est nous qui devons alors, en Sa Présence, lui répondre, en portant, de nous à Dieu, la "Bonne nouvelle" de son Royaume en nous.


    L'église, le seul lieu où sans blesser le deuil le plus cruel ou la plus ombrageuse délicatesse, tout puisse non seulement se dire, mais se chanter.


    Pour être belle, une âme doit ressembler à une église, et une église à une âme.


    La lumière est silencieuse. Le son ne se voit pas. Mais seule la lumière permet dans une foule de reconnaître celui qui parle.


    On ne peut guère écouter quelqu'un - surtout Dieu - sans se taire. Certains et non des moindres semblent parfois l'oublier tant soit peu.


    Sois celui que tu voudrais rencontrer parmi les autres, surtout si tu ne rencontres point, parmi les autres, celui que tu aimerais rencontrer.



     Vladimir Ghika - Pensées pour la suite des jours - Beauchesne 1936.


  • Paroles de Vladimir Ghika (11)

    Tu veux écrire vraiment de belles choses, des choses qui durent, et les bien écrire ? Alors ne songe, en écrivant, qu'au Livre de Vie.


    Pour bien parler publiquement aux hommes des choses de Dieu, il faut d'abord savoir parler aux hommes devant Dieu, puis à Dieu devant les hommes.


    Ce n'est jamais Dieu qui vient à nous manquer, c'est nous qui manquons à Dieu.


    Aimer Dieu, c'est aussi une des façons d'apprendre à n'avoir peur de rien.


    En aimant Dieu, n'aimez pas moins ceux que vous aimez ; mais aimez-les davantage en Dieu.


    En aimant Dieu, n'aimez pas moins ceux que vous aimez, mais aimez Dieu davantage.


    Sur le chemin de la perfection, ceux qui, tant soit peu, se croient "arrivés", prouvent, par là, qu'ils ne sont même pas "partis".


    Pour commencer à entrevoir Dieu, il faut déjà s'être perdu de vue.



     Vladimir Ghika - Pensées pour la suite des jours - Beauchesne 1936.

  • Paroles de Vladimir Ghika (10)

    Samedi-Saint... Le jour depuis lequel il y a de la lumière dans les tombes, des dalles surhumainement soulevées et des anges victorieux, resplendissants, plus foudroyants que la mort, huissiers d’Éternité, au chevet des cadavres.


    Dieu fait en sorte que les choses de ce monde renoncent à nous, quand nous ne renonçons pas assez vite aux choses de ce monde.


    Le ciel est mon abri ; - qu'importe si c'est le seul ?


    Le conflit du mauvais pauvre et du mauvais riche, triste et presque seule histoire de trop de temps et de sociétés.


    Le sang tache toujours. Seul le sang qui rachète ne tache pas. Bien plus. Il lave. Il lave jusqu'à l'ineffaçable.


    Dieu est doux,  Dieu est humble, parce que l'Amour infini ne saurait être autrement (...) Être dur et altier (...) c'est ne pas ressembler à Dieu, ne pas Le voir, et ne pas Le comprendre. 


    Rien au monde, sauf le péché, ne peut nous séparer de Dieu.


    Dieu est seul à pouvoir faire quelque chose des larmes humaines sans les profaner.



     Vladimir Ghika - Pensées pour la suite des jours - Beauchesne 1936.


  • Paroles de Vladimir Ghika (9)

    Sois doux envers ton malheur comme envers un frère plus jeune...


    S'oublier c'est en général se mettre à sa place.


    Si le Seigneur refuse de s'arrêter pour t'entendre, quand tu L'as trop et trop longtemps offensé, appelle-Le au nom du baiser rendu à Judas, - Il s'arrêtera.


    La plupart des tentations : la lutte des heures contre l’Éternité.


    L'univers est unanime.


    Tous les mouvements du ciel sont des pèlerinages.


    L'homme est un être frontière, à la ligne de partage des mondes, né pour la médiation, et voué à un sacerdoce.


    Y a-t-il plus pauvre qu'un orgueilleux ?


    Joie éblouie du jour où toutes les providences deviendront des évidences.


     Vladimir Ghika - Pensées pour la suite des jours - Ed. Beauchesne, 1936





  • Paroles de Vladimir Ghika (8)

    Ce n'est point ce qu'on fait qui importe, mais la façon dont on le fait, ce n'est pas ce qui arrive, mais la façon dont on l'accueille.


    La route est laide, et d'autant plus laide et monotone qu'elle est une meilleure route - mais elle conduit au but et quelles merveilles ne nous laisse-t-elle pas voir, chemin faisant, parfois, de chaque côté.


    Toute immensité repose et se repose.


    Dieu nous cherche dans la bassesse comme nous le cherchons dans la transcendance et le fait avec une passion du même ordre mais d'une intensité divine.


    Sans Dieu nous n'avons pas d'intimité véritable avec le réel. En dehors de Lui, nous n'abordons que des surfaces ou des hostilités.


    L'automne éclaircit les futaies et semble éclaircir en même temps de la même façon nos réflexions sur la vie, en semant parmi elles comme parmi les feuillages une sorte de désordre appauvri et d'abandon. Il se fait en nous un dépouillement froid et facile et des nettetés désolantes surgissent. 

     Vladimir Ghika - Pensées pour la suite des jours - Beauchesne 1936

  • Paroles de Vladimir Ghika (7)

    Les prières sont plus secrètes encore que les infamies, et les déjouent.


    Le Temps prie et l’Éternité loue.


    En un sens plus Dieu se montre, plus Il se cache ; plus Il se laisse voir tel qu'Il est, plus Il se révèle inaccessible - ou plutôt Il se fait sentir et connaître comme inaccessible car c'est Lui qui se fait alors notre accès à Lui-même.


    N'est-ce rien que d'avoir pour seul juge de notre bonheur éternel quelqu'un qui a été jusqu'à mourir pour nous ?


    Les vérités ne sont cruelles qu'à la façon des chirurgiens.


    Le temps pour nous a la légèreté des pas du voleur, l'adresse de sa main, l'efficacité de son geste, et porte avec lui la détresse inquiète d'une même irréparable extorsion.


    Le présent a un nom d'une étrange éloquence. Il est avant tout un présent, un don de Dieu, qui appelle, avant toute autre action, l'action de grâces.


    Ce n'est point tant ce qu'on fait qui importe, mais la façon dont on le fait, ce n'est pas ce qui arrive, mais la façon dont on l'accueille.


     Vladimir Ghika - Pensées pour la suite des jours - Ed. Beauchesne

  • Quand Vladimir Ghika rencontre Francis Jammes

    Un jour que je me trouvais à Paris dans une boutique, un homme jusque-là inconnu de moi me tendit mon livre de Saint-Joseph et me pria d'y apposer un autographe. Il se tenait dans l'ombre et sa voix revêtait une singulière douceur. Ainsi une violette, dans la solitude, parlerait-elle. Je compris qu'il ne tenait qu'à ma signature et que, volontiers, il eût tu son nom que je lui demandai pourtant. En hésitant, il me répondit : " Je suis le Prince Vladimir Ghika." Il me remercia d'un salut très humble, mais qui accusait, encore plus qu'une origine royale, une source divine : celle auprès de laquelle Jésus fatigué s'est assis en ayant soif.  Puis il s'effaça.

    Je sais aujourd'hui que ce passant, marqué d'un signe qui rend sa couronne invisible autant que l'anneau de Gygès, a vécu justement à l'opposé d'un Oriental dont jadis on nous a conté l'histoire. Celui-ci, de berger devint monarque. Mais, au plus fort de son opulence et de sa gloire qui lui pesaient, il allait contempler, dans un lieu secret de son palais, ce manteau grossier, cette houlette, ces sabots, cette flûte qui avaient été sa pauvre mais sûre joie, alors qu'il vaquait aux soins des troupeaux comme David enfant. Et il demeurait inconsolable de ne pouvoir abdiquer sa puissance et l'échanger pour sa pauvreté première.

    Il n'en sera pas ainsi de Vladimir Ghika. Prince, il a été fait pasteur, et d'une main plus puissante que celle qui avait élevé le Psalmiste à la dignité suprême. Renversement des choses d'ici-bas ! C'est bien l'un de vos coups, Apprenti de Nazareth, qui avez permis que cet illustre Roumain occupât la dernière place, mais de telle sorte qu'il régnât sur vous qui accourrez à son appel.

    Pour nous, simples brebis, nous avons reconnu la voix de ce pipeau pour être celle qui nous rassemble dans le val catholique, voix aussi dépouillée que la lumière d'un astre ou que l'eau qui sourd du rocher.

    On dit que les indiens, en jouant d'une trompette démoniaque donnent l'illusion qu'un manguier naît aussitôt à leurs pieds, avec ses feuilles, ses fleurs, ses fruits, sa rosée.

    Mais vous, prince dépossédé par le Christ, ce n'est pas une vaine image, mais une présence réelle que suscite votre génie. Nous vous écoutons et notre cœur s'emplit à mesure des blés et des grappes de Canaan.

    Francis Jammes - Préface à "Pensées pour la suite des jours" Beauchesne

  • Paroles de Vladimir Ghika (6)

    Dans la vie de chacun la possession de Dieu est la seule qui soit sûre de ne voler personne et qui, au contraire, enrichisse tout le monde.


    Qui n'est pas mortifié, mourra mal.


    Si tu sais prendre sur toi la douleur d'autrui, le Seigneur prendra sur Lui la tienne et la fera Sienne, c'est-à-dire ouvrière de salut.


    "Les cheveux de ta tête sont comptés. Crois-tu que je perdrais la moindre de tes larmes ?"


    Le chemin du Ciel est étroit mais le ciel est large. Le chemin du Ciel est étroit mais il est plus facile de ne pas dévier dans un sentier que dans une plaine.


    Ceux-là même qui n'ont plus de regard peuvent avoir des visions.


    Je crois à Ta bonté plus qu'à la réalité même qui me fait souffrir, plus qu'à ma torture.


     Vladimir Ghika - Pensées pour la suite des jours - Beauchesne 1936.




  • Vladimir Ghika : petite biographie

    Issu d'une famille princière de Roumanie, Vladimir Ghika naît le jour de Noël 1873 à Constantinople où son père exerce des fonctions de diplomate. Baptisé et confirmé dans l’Église orthodoxe, la religion de ses parents, il arrive en 1879 en France, son futur pays d'adoption auquel il est déjà lié par sa mère. Étudiant à Toulouse puis à Paris, il acquiert une formation humaine et spirituelle subtile et profonde qui l'ouvre aux trésors de l’Église catholique qu'il intègre en 1902.

    Il entreprend des études théologiques à Rome qui se concluent par un doctorat, puis bien plus tard, en 1923, par une ordination sacerdotale pour le diocèse de Paris. Menant de front bien des activités diplomatiques, intellectuelles et apostoliques, il exerce son ministère à Paris, où sa vie est nourrie de multiples amitiés spirituelles et entrecoupée de nombreux voyages à Rome, en Australie, au Japon, en Argentine...

    La seconde guerre mondiale le surprend dans une Roumanie vite soumise aux forces communistes. Très vite perçu comme un obstacle à l'affirmation de l'idéologie communiste, il est arrêté et emprisonné près de Bucarest. Deux ans plus tard, en mai 1954, il décède à l'âge de quatre-vingts ans, en détention.


    ÂME CONTEMPLATIVE

    La vie de Mgr Ghika a été très tôt marquée par le sentiment de la présence continuelle de Dieu. Son quotidien était sous-tendu par une intense et sereine prière, débutée tôt le matin, prolongée tard le soir. Cette familiarité pour les choses de Dieu, toute habitée de la présence de la Vierge, et d'accent johannique, était le lieu de son obéissance aux inspirations divines. Désireux d'en étendre l'apprentissage, il fonda pour quelques temps la Société des frères et Sœurs de saint Jean.


    APÔTRE DES PAUVRES

    Très sensible aux besoins du monde, Mgr Ghika se dépensa d'une manière incessante pour le soin des pauvres, des malades et des exclus, à Paris, à Rome, ou en Roumanie, méritant le titre de "Nouveau Monsieur Vincent". Durant sa vie de laïc puis de prêtre, il a mis à profit ses nombreuses et influentes amitiés pour promouvoir toutes sortes d'initiatives. Il a introduit ainsi les Filles de la Charité en Roumanie et plus tard s'installe à Villejuif où, dans un souci d'évangélisation, il séjourna trois ans en milieu ouvrier. Il concevait la vie de charité comme l'âme de sa vie chrétienne, et la rencontre du prochain comme une authentique liturgie.


    Ce texte est tiré d'un dépliant réalisé par l'Association pour la Béatification de Mgr Vladimir Ghika dont l'adresse est :

    ABMVG - 71 av du Général de Gaulle 92800 Puteaux.

  • Paroles de Vladimir Ghika (5)

    Que pour te rappeler le souci de tes frères, la flamme du foyer te soit comme le Buisson-Ardent - que pour accueillir leurs misères, le toit de ta maison évoque celui de l'Arche dans le Déluge


    Si ton frère te fais injustement quelque tort, tu dois en souffrir pour lui plus que pour toi même. Le tort qu'il te fait sera toujours au-dessous du mal qu'il se fait - car il nuit à son âme sans atteindre la tienne, et en bon frère, tu dois sentir cela plus vivement que le  tort qu'il te cause.


    Consoler c'est pouvoir apporter à autrui quelque chose de plus vrai que sa douleur. Consoler c'est faire vivre une espérance. Consoler c'est laisser voir en nous à celui qui souffre, l'amour de Dieu pour lui.


     Vladimir Ghika - Pensées pour la suite des jours - Gabriel Bauschesne édition, 1936.




  • Paroles de Vladimir Ghika (4)

    Celui qui fait pleurer les autres est celui qui aura le plus à pleurer sur lui-même.

    Qui se venge après avoir été frappé se frappe une seconde fois et, cette fois, de sa main.

    Peu de leçons sont aussi intimement intéressantes que le jugement de nos adversaires, si absurde qu'il puisse paraître quelque fois.

    D'autrui, les silences nous jugent autant que les plaintes



     Vladimir Ghika - Derniers témoignages - Éditions Beauchesne 1970

  • Paroles de Vladimir Ghika (3)

    Remarques préliminaires de l'auteur de ce blog :

    Certaines paroles (ci-dessous) de Mgr Ghika pourront parfois choquer notre sensibilité.  Et elles le sont si nous pensons que la mort débouche sur le néant. Mais le coeur de notre foi c'est le mystère pascal : le Christ, vrai Dieu et vrai Homme, est ressuscité d'entre les morts ; la mort a été vaincue. Par le Baptême et l'Eucharistie nous participons déjà à sa Vie mais dans la foi. La mort,notre mort,  depuis la victoire du Christ, est, sera une Pâque, une sortie d'Egypte, où nous rejoindrons la Terre Promise et verrons alors Dieu face à face (si nous mourons en état de grâce). Le Père Varillon disait : nous sommes nés à la vie humaine pour naître à la vie divine. Saint Irénée disait déjà : la vie de l'homme c'est la vision de Dieu. Et comment ne pas citer Thérèse de Lisieux qui, quelque temps avant de mourir, confiait : "je ne meurs pas, j'entre dans la Vie."

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    NOUS :

    Que faut-il penser de nos morts ?

    LUI :

    Ils ne nous ont pas quittés. Appelle-t-on perdus ceux qu'on a seulement perdus de vue ?

    Nos morts ont la réalité de leur présence et la forme de leur absence.

    Rien de plus vivant que l'immortalité des morts.

    On appelle mort l'espèce de vivant dont l'état de vie ne redoute plus aucun changement.

    Le rôle des morts n'est plus d'avertir ni de témoigner.

    Les morts aident plus volontiers que les vivants.

    Seigneur ! n'enlevez pas ceux que j'aime ! - Réponse : " je ne te les enlève pas : je te les garde".

    NOUS :

    Que faut-il penser de notre propre mort ?

    LUI :

    Elle se prépare durant toute la vie : qui ne pense pas à la mort, ne sait pas vivre.

    Il faut arriver à avoir plus peur de la vie que de la mort, et à aimer la mort aussi bien que la vie.

    Durant ta vie, souviens-toi que tu dois mourir, et à ta mort, que tu dois vivre.

    (...)

    Chacun est le pèlerin de sa propre mort.

    A sa mort, tout homme se fait moine, avec les trois voeus de pauvreté, chasteté, obéissance. Et, bon gré, mal gré, il les jure.

    Dire qu'après tant de siècles, l'homme n'a pas appris encore à mourir.

    On doit attendre la mort non comme un condamné, mais comme un combattant.

    NOUS :

    Mais elle comporte de telles angoisses !

    LUI :

    Ce qui nous gêne le plus dans la mort, c'est le caractère radical de son inconnu.

    (...)

    S'il est dur de mourir, cela prouve à quel point nous sommes vivants, et jusqu'au-delà de la mort.

    (...)

    Nous avons à envisager la mort non comme une abdication forcée, mais comme un événement consenti.

    Ce qui a été, ce qui est et ce qui sera se fond, à l'heure de la mort, en une chose unique.

     

    Vladimir Ghika - Derniers témoignages - Ed Beauchesne 1970

     

  • Paroles de Vladimir Ghika (2)

    L'ennui lui-même est un signe de notre vocation divine.

    Il est surprenant de voir la quantité de personnes qui s'imaginent pouvoir chercher et trouver Dieu ailleurs qu'en Dieu.

    Le jour est fait pour voir les choses, la nuit pour les comprendre et les dominer.

    Qui n'a plus que Dieu a tout.

    Le péché, c'est de ne mettre plus Dieu à sa place

    Heureux ceux qui ont été déçus par les choses de la terre, car ils ne le seront point par les choses du ciel. 

    Nous n'avons qu'un seul problème à résoudre, et il est de taille : celui de notre éternité. Les autres n'existent qu'en fonction de lui. 

     

    Vladimir Ghika - Derniers témoignages - Beauchesne 1970 

     

  • Paroles de Vladimir Ghika (1)

    On apprend à "faire". Il faudrait bien, davantage, apprendre à "être".


    Si j'existe, c'est que Dieu m'aime.


    Fais en sorte que, si tu parviens au grand âge, cet âge ait quelque chose de grand.


    Celui qui n'a pas pleuré sur lui-même n'a pas commencé à se connaître.


    On ne peut vraiment se connaître qu'avec l'aide de Dieu et à sa lumière.

     

    Vladimir Ghika - Derniers témoignages - Beauchesne 1970 

     

     

  • Portrait de Vladimir Ghika qui sera béatifié le 31 août

    Disponible à tous les appels qui l'invitent au service des âmes, Mgr Ghika est toujours en route : le matin au Congo, à midi à Buenos-Aires, pour le thé de 5 heures à Tokyo, que dis-je ? le voilà à Calcutta ; puis à Melbourne. Et toujours à Paris par le coeur. Cette étonnante disponibilité est l'apparence mouvante d'une bonté sans frontières. La longue chevelure blanche et le visage d'ivoire de ce petit-fils du dernier prince régnant de Moldavie, nourri dans les lettres françaises, devenu prêtre de l'Eglise catholique romaine et commissionnaire de toutes les oeuvres pies, évoquent à tous les carrefours de la charité l'image d'un Saint-Nicolas de style moderne résistant à toutes les intempéries, curieux de toutes choses et informé de tout, content de passer pour les pauvres du Christ par-dessus les règlements et les barrières des systèmes et de l'égoïsme des hommes, dur pour lui-même et pressé d'apporter à toute misère un remède approprié.

    Ainsi la matière et l'expérience n'ont pas manqué à ses réflexions, depuis qu'il fréquente les grands malheurs et entend les petites histoires des uns et des autres. Ici et là, ce qu'il cherche à discerner c'est le point secret où Dieu et l'âme se rencontrent. Une imagination extraordinairement vive et précise le porte à ourler sa pensée d'un contour verbal minutieux et singulier, et à vêtir parfois d'une certaine préciosité une spiritualité exigeante et élevée, une piété toujours en éveil.

    Jacques Maritain - Préface à "Pensées pour la suite des jours " de Vladimir Ghika