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moïse

  • Préliminaires à la prière - 07

    Les trois conditions requises pour prier :  seconde condition

     

    Pour entrer en prière (en oraison), trois conditions sont requises :

    - se placer sous le regard de Dieu, [billets 1 à 6 ]

    - purifier son cœur,  [billets 7 à ... ]

    - invoquer l'Esprit Saint. [ billets ... à ... ]

     

    LA PURIFICATION DU CŒUR

    Dès que nous nous sommes pénétrés de la présence de Dieu, il est nécessaire de travailler à la purification de notre cœur. C'est, normalement, la deuxième activité à laquelle nous devons nous livrer, une fois entrés en prière. Cependant, comment s'appliquer sérieusement à cette besogne, si nous ne sommes intimement convaincus de son urgence et de sa nécessité.

     

    L'exemple de Moïse

    "Il ne s'est plus élevé en Israël de prophète pareil à Moïse, lui que Yahvé connaissait face à face" (Dt 34,10). Le Deutéronome résume par cette phrase la carrière de cet ami exceptionnel du Seigneur. Or, si ce géant d'Israël s'est confronté souvent avec l'Invisible, ces rencontres n'en ont pas moins connu des saisons, des rythmes, disons même des lois très spéciales. Au commencement, le libérateur des Hébreux n'est qu'un pâtre du désert de Madian lorsque l’Éternel, à l'affût dans un buisson l'interpelle : " l'Ange de Yahvé se manifeste à lui sous la forme d'une flamme de feu, jaillissant du milieu d'un buisson. Moïse se dit alors : " Je vais m'avancer pour considérer cet étrange spectacle et voir pourquoi le buisson ne se consume pas." (Ex 3,2 et suivant). Moïse affronte soudain un phénomène étrange. Des épines embrasées qui ne se consumaient pas. Flaire-t-il le mystère ? Veut-il en sonder la grandeur ?...

    " Yahvé le vit s'avancer pour mieux voir et Dieu l'appela du milieu du buisson :  Moïse, Moïse - Me voici, répondit-il." Au plus ardent de ces braises, une voix parle. Elle appelle Moïse par son nom. Moïse répond. Entre l'invisible interlocuteur et le berger de Jethro, un dialogue commence. Remarquez alors la suite. " N'approche pas d'ici !" Paradoxe de Dieu : il attire et il repousse. Il convoque et il renvoie. Entre la créature et Lui s'étend un espace, une zone sacrée qu'il ne doit pas franchir. "Autant le ciel est haut au-dessus de la terre." (Is 55,9)

    "Ôte les sandales de tes pieds, car le lieu que tu foules est une terre sainte" Partout où réside le Très-Haut, partout où tombe l'ombre de ses ailes, s'étale en même temps un lieu infiniment respectable. Nul n'y pénètre sans précaution, disons mieux, sans purification. Les sandales que le Voyant du Buisson doit retirer de ses pieds symbolisent cette révérence. Pour fouler la terre sainte où Dieu se manifeste, il faudra toujours se dépouiller, s'humilier [attention cependant aux contrefaçons de l'humilité : remarque de l'auteur de ce blog], s'abaisser. Nous pourrions maintenant évoquer d'autres rencontres de Moïse avec Yahvé. Elles révéleraient toujours, d'une manière ou d'une autre, cet instant de respect, d'humiliation totale que le Seigneur des Seigneurs impose à l'homme fragile et pécheur. Mais il est plus intéressant de saisir à d'autres moments de la Révélation biblique  des attitudes semblables pour mieux comprendre combien, de la part de Dieu, il y a une volonté continue de susciter chez ses adorateurs les mêmes comportements. 

                                                           A suivre...

                                       Pierre Lauzeral - Préliminaires à la prière

     

       prochains posts (billets) :

       post n°8 : L'exemple d’Élie

      post n° 9 : L'exemple d'Isaïe

      post n° 10 : La voie de l’Évangile

      post n° 11 : conclusions pratiques

      post n° 12 et suivant  : la 3ème condition requise pour prier : l'invocation de l'Esprit-Saint

     

  • foi et révélation

    (...) (21) Prenons la phrase dans laquelle Levinas résumait la Bible : " Tu te dois à autrui " ! A mon avis, c'est là une pensée tout à fait chrétienne, quoique formulée par un juif. Mais c'est très fort cela, n'est-ce pas ? Et l'homme que nous avons connu, c'est celui qui est hanté par cette parole-là : tu te dois à l'autre ! Pourquoi irais-je me soucier du pauvre, du SDF ? Pourquoi ?

    Cette idée d'une altérité qui est à la fois dans la dignité de l'autre et dans le fait que je me sens appelé à un avenir autre : c'est cela la foi ! Et, finalement, quel est le soutien de la foi ? La révélation, oui... Mais peut-être aussi le sentiment très fort de l'obligation que j'ai de chercher à sauver le monde, à sauver l'idée de l'homme, en cherchant à sauver ma foi. Je pense que c'est quelque chose comme cela... Avec un passage à l'universel, déjà annoncé par les prophètes. C'est étonnant de voir comment nous revivons le drame de l'Israël ancien, qui avait inventé sa révélation !

    "Inventer", c'est un mot qu'il faudrait repenser autrement ! Mais enfin, quand les historiens nous apprennent que les récits des cinq livres bibliques appelés le Pentateuque ont été composés très tardivement, après le retour d'exil du peuple de Juda, sur la base de légendes, de souvenirs et de traditions, dans le but de doter ce peuple d'une histoire qu'il n'avait pas, on n'a plus aucune preuve qu'Abraham et Moïse aient jamais existé. Alors, la révélation de Dieu à Abraham et à Moïse; comment nous, chrétiens, pouvons-nous y croire ? Nous y croyons parce que Jésus l'a repensée - ce qui pose d'ailleurs un problème pour nous - mais enfin elle est liée à sa propre révélation, elle est la mémoire de Jésus. Comment le théologien peut-il sauver autrement l'idée de révélation ? En disant que c'est cette idée qui a forgé l'identité du peuple juif ? Je ne sais pas. Mais moi chrétien, je ne peux pas me reposer simplement sur (22) une révélation qui aurait été faite à un autre peuple auquel je n'appartiens pas. Le livre de Shlomo Sand sur L'invention du peuple juif va poser des questions à un certain nombre de juifs qui se considèrent comme membres du peuple de Dieu. Si c'est la mémoire d'Abraham qui fait l'unité de ce peuple, pour nous chrétiens, c'est la mémoire de Jésus, je pense qui nous permet de recevoir la tradition d'Israël comme révélation, c'est-à-dire comme cheminement de la Parole de Dieu vers les Nations. Mais pourquoi ne pas voir cette Parole - cet appel  à l'humanisation de l'homme - cheminer aussi à travers les cultes rendus à Dieu depuis le commencement de l'humanité ?

    Joseph Moingt - Croire quand même - TempsPrésent , 2010

  • Chemin vers Pâque (19)

    [17]

    Pâque veut dire passage, passage par la mort, par le seuil de la mort. Il y a trois pâques dans l'histoire : la pâque des Hébreux ; la pâque du Christ que nous méditons en ce moment et notre pâque à nous.

    La pâque des Hébreux

    Dans la catéchèse courante, on raconte aux enfants des tas de petites histoires, mais on les laisse ignorer le livre de l'Exode, cela est scandaleux. Or il est extrêmement facile, me semble t-il, d'en rendre accessible l'essentiel à de jeunes enfants.

    Voilà donc des Hébreux qui sont une minorité opprimée en Egypte. Ils travaillent sous le fouet, avec un maigre salaire, leur portion d'oignons - les fameux oignons que l'on voit encore pendre de nos jours dans les petites baraques, comme en France on vend des marrons en hiver. Les Arabes qui n'ont pas d'argent achètent quelques sous, quelques centimes d'oignons. Un jour, le pharaon décida d'augmenter les cadences. Dans le monde moderne, tout le monde sait ce qu'est l'augmentation des cadences. (...) Augmentation des cadences [18], c'est-à-dire plus de travail sans augmentation de salaire. Le pharaon décida que les Hébreux transporteraient non seulement les briques pour la construction des maisons, mais qu'il leur faudrait aussi trouver de la paille et la transporter. On fabriquait les maisons avec des agglomérés de brique, de paille et de terre sèche. Oppression, donc.

    Moïse interrogea Yahvé en lui disant : " C'est intolérable. Ton peuple est opprimé." Et Yahvé répondit : " Oui, tu as raison, c'est intolérable. Je ne veux pas que mon peuple soit un peuple d'esclaves. J'ai entendu la clameur qui monte de mon peuple, le cri des opprimés..." C'est  l'esclavage. Alors Yahvé dit : " Tu vas prendre la tête de la colonne et tu vas les faire passer - pâque, c'est-à-dire passage - dans la terre que j'ai promise à tes Pères, la terre de Canaan et qui est la terre de la liberté. Je veux que mon peuple soit un peuple libre. " L'Evangile ne peut pas  être entendu par un peuple qui n'est pas libre, ce n'est pas possible. 

    Poussons un peu plus loin si nous voulons pouvoir dialoguer avec nos contemporains. Qu'est-ce que c'est que la liberté d'un peuple ? C'est toujours deux choses : l'indépendance politique et la prospérité économique. Quand l'une des deux manque, le peuple n'est pas un peuple libre. Or la terre de Canaan sera une terre d'indépendance politique et Dieu interviendra toutes les fois que l'indépendance politique sera menacée par les Assyriens, les Babyloniens, les Egyptiens... Prospérité économique : c'est la terre où coulent le lait et le miel (Cf. Ex 3,8) dit la Bible.

    Oui, mais entre l'Egypte de l'esclavage et la Palestine de la liberté s'étend un désert, immense, le désert du Sinaï, et ce désert doit être franchi. Tel est le désert, impossible de le contourner (...) Pas de métro, pas d'avion. Il faut traverser le désert. Quarante ans. Un chiffre symbolique évidemment, c'est-à-dire un temps très long. Nous retrouvons ce chiffre symbolique avec les quarante jours du carême, les quarante jours de Jésus au désert au commencement de sa vie publique... C'est la reprise des quarante ans, c'est-à-dire du temps très long de la traversée du désert.

    [19] Plus les Hébreux avancent dans le désert, plus ils ont le sentiment d'aller vers la mort. Ils tombent d'ailleurs comme des mouches. Une véritable retraite de Russie où ils sont affrontés non pas à la neige, mais au soleil et à la calcination. Ils ont faim et il faut le miracle de la manne. Ils ont soif et il faut que Moïse fasse jaillir l'eau du rocher avec sa baguette. Il y a le miracle des cailles. Et leur tentation c'est de regretter leurs oignons, comme le grain de blé qu'on enfonce en terre regrette son petit bonheur de quatre sous dans son grenier, et comme la chenille commence par regretter sa vie de chenille et la petite fille sa vie d'enfant.

    Alors, c'est la révolte. Ils veulent revenir en arrière. Claudel a transposé cela dans son Livre de Christophe Colomb. Lorsqu'au milieu de l'océan il n'y a plus à manger, plus rien à boire, etc., les soldats de Christophe Colomb se révoltent  et veulent revenir en arrière et ne pas découvrir le Nouveau Monde, qui est le symbole de la vraie vie.

    On ne peut pas court-circuiter le désert. On ne peut pas échapper à la mort comme seuil de la vraie vie. C'est le thème du désert, qui est fondamental dans la vie. (...)

    C'est la première pâque de l'histoire, le premier passage de la vie présente à la vie divine.  

    Francois Varillon - La Pâque de Jésus - Bayard Editions 1999

  • à main forte et à bras étendu

    61. Yahvé, c'est celui qui se révèle d'une façon non pas étrangère, 62. mais étrange, selon son absolue liberté. Il n'est pas lié à un lieu plus qu'à un autre, parce qu'il se révèle sur une montagne située en dehors du chemin des hommes, et qu'on atteint seulement au terme d'un laborieux détour, après un total dépaysement.

    Il n'est pas lié à un instant plus qu'à un autre, parce que, sur cette montagne, il se permet de tarder (Ex 32,1), signifiant par là qu'il se manifeste quand il veut, et que nul ne peut lui intimer des sommations pour le faire descendre à sa guise.

    Il n'est pas lié à une figure plus qu'à une autre, et récuse catégoriquement toutes celles que l'homme tenterait de lui donner, même pour lui faire fête (Ex 32,5); car personne ne peut avoir prise sur lui. Tout cela, le diacre Etienne l'a fort bien compris après la Pentecôte (Ac 7, 35-50). Bref, Yahvé se révèle dans des phénomènes de rupture, au-delà même du prodigieux, dans un souffle imperceptible (1 R 19, 11-12).

    Le prier, c'est accepter la privation de toute image, même sacrée : ce n'est pas pour rien que l'Evangile lie la prière avec le jeûne, et la retraite avec la tentation. Car Yahvé est éprouvant : le Christ, au désert, l'a lui-même expérimenté.  

    Yahvé, c'est au rebours d'Elohim [Elohim, mot pluriel, correspond à ce que nous nommerions aujourd'hui la divinité], celui qui ne demande ni culte ni sanctuaire. Au Sinaï, lui seul fait quelque chose, à quoi le croyant acquiesce, dans cet abandon total que la Bible nous dépeint de deux manières : se déchausser devant le Buisson (Ex 4,5), se voiler le visage dans la brise qui passe (1 Ro 19,13). Aucune liturgie, aucune pierre dressée, aucune dédicace ; l'homme ne touche à rien, en ce lieu qui ne lui appartient pas, situé qu'il est sous la nuée. Il croit à la présence, et se laisse chérir par ce Dieu qui "aime le premier " (1 Jn 4,19) (...)

    Yahvé (...) c'est un nom propre, personnalisé, donc une confidence amicale (Ex 33,11). Et ce nom, chose remarquable, c'est un verbe, un verbe non pas auxiliaire mais actif : " Je suis ", c'est-à-dire : "Je te suis présent, intensément." 

    Yahvé, ce n'est pas d'abord le créateur (cette notion viendra bien plus tard) : c'est le rédempteur attentif : " J'ai vu la détresse de mon peuple... j'ai entendu son cri... je suis descendu pour le faire sortir d'Egypte " (Ex 3, 7-10) Le Dieu d'Israël se révèle 63. donc comme une puissante philanthropie, qui va mettre en branle toute une histoire libératrice. Il ne se livre pas comme un concept métaphysique ( "l'étant" ), dont il suffirait d'admettre que "ça existe", mais comme le Seigneur des événements, comme l'intervention efficace " à main forte et à bras étendu ". Il ne s'offre pas comme un déisme oisif, mais comme une tendresse agissante.

    Yahvé, c'est celui qui envoie en mission, qui propulse énergiquement Moïse (si réticent !) vers Pharaon, et Elie vers Jéhu, pour leur faire exécuter une oeuvre précise et combien difficile, au milieu de l'hostilité générale. L'apostolat plante ses racines dans une expérience de ce type ; la mission est mystique. C'est fort de cette révélation si intime et si dense que l'envoyé affronte l'opposition, quitte, s'il succombe un temps au découragement, à revenir comme Elie, se blottir à nouveau au creux du rocher, pour vérifier la présence, ré-entendre l'amour et recevoir une nouvelle impulsion missionnaire. Il redescend alors de la montagne le visage rayonnant à son insu (Ex 34,29) ; et Paul a bien compris  que le ministre de l'Evangile, pour avoir contemplé Dieu sur la face  de Jésus-Christ, est encore plus étincelant que Moïse ( 2 Co 3, 7-8). 

    Telle est l'expérience originelle d'Israël, qui imprègne toute son histoire, et dont Jésus sera la perfection achevée, lui dont le nom signifie " Yahvé sauve" (Mt 1,21)

    André Manaranche - Je crois en Jésus-Christ aujourd'hui - Seuil 1968