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  • jugement universel et jugement particulier

    NOTE DE L' AUTEUR DE CE BLOG : 

    Ici François Varillon aborde un sujet extrêmement sensible. Ce texte a été écrit dans les années 1955-1958. Par la suite sa réflexion s'est enrichie sur ce sujet. Je compte mettre une conférence sur le même thème donnée par F. Varillon 20 ans plus tard.

     

    [366]

    Il faut d'abord envisager le jugement en son unité. Car il est un, plus profondément qu'il n'est multiple. Il s'achève seulement à la fin des temps, quand toute sa "matière" est donnée : alors son caractère social et cosmique est manifesté. En tant qu'individuel, il se réalise à la mort de chacun. Mais à ce double point de vue, il commence déjà au cours de l'histoire, à laquelle il est coextensif. 

    Le Jugement universel

    La doctrine du jugement dernier a été préparée et préfigurée dans l'Ancien Testament  par la notion du "jour de Yahvé". On entend par là toute intervention extraordinaire de Dieu pour éprouver, châtier, sauver : image du dernier Jour, et commencement de Jugement (cf. Amos 5, 18-20 ; et Sophonie, le prophète par excellence du "jour de Yahvé"). [367]. Le dernier Jour est celui de la délivrance d'Israël, de son salut définitif (cf. Daniel 7, 9-14 ; 12,1-3) : ce salut ne sera pas accordé à tous sans distinction, mais seulement à ceux dont les noms sont inscrits sur le Livre de vie ; en ce jour les morts ressusciteront et seront traités selon leurs mérités, " les uns pour la vie éternelle, les autres pour l'opprobre, pour la honte éternelle." Par ailleurs, le problème de la destinée individuelle est posé dans la littérature sapientielle sous la forme de la justice et de la rétribution.  Cette double ligne de développement aboutit à la révélation, dans le Nouveau Testament, du Jugement pleinement spirituel, universel et transcendant (Mt 16,27 ; 25,31-46 ; 2 Thes 1, 3-12 ; 2 Co 5,10 ; Rm 14,10 ; Jn 5,27-30). L'idée du jugement dernier est au premier plan de l'eschatologie des Pères, liée à la Parousie et à la résurrection : " Personne ne nie, écrit saint Augustin, personne ne doute que Jésus-Christ doive faire un dernier jugement, comme il est annoncé dans les saintes Écritures , sinon celui qui, par je ne sais quel aveuglement, refuse de croire aux Écritures mêmes." (De civ. Dei, XX,30). Plus tard, quand l'idée du retard de la vision béatifique aura été tout a fait abandonnée, le jugement universel perdra de son importance  au profit du jugement particulier.

    Le jugement particulier.

    Il est de foi définie que les justes "n'attendent pas" la fin des temps pour entrer dans la béatitude (Dz, 464,531) ; dès leur mort, les hommes sont jugés, et leur sort déterminé. Le jugement particulier, cependant, en tant que jugement n'est pas de foi comme le jugement général : l'Eglise n'en parle pas explicitement  [368] ni précisément dans les documents du Magistère. Quelques passages de l'Ecriture, à la vérité assez rares, insinuent l'idée d'une rétribution suivant immédiatement la mort : le pauvre Lazare emporté dans le sein d'Abraham tandis que le riche descend en enfer (Lc, 16, 22 sq.), Jésus promettant au bon larron une récompense "aujourd'hui même" (Lc 23,43), saint Paul exprimant sa certitude d'être réuni au Christ après sa mort, comme si mourir et être avec le Christ c'était tout un (2 Co 5,8 ; Phil 1,23). Mais une telle certitude n'implique pas un enseignement clair et explicite sur un jugement particulier distinct du jugement universel ; elle procède bien plutôt d'une expérience religieuse, celle d'une union infrangible avec le Christ, inaccessible aux événements extérieurs. Cette certitude coexiste, dans l'oeuvre de saint Paul, avec l'espérance du retour du Seigneur dans la gloire et de la réunion en Lui de tous les chrétiens. A partir de cette tension intérieure à la pensée paulinienne (certitude mystique de la possession actuelle du Terme, du Jugement déjà accompli, de la Présence donnée, et attente eschatologique), une doctrine explicite du jugement particulier pourra s'édifier. Elle se développera en liaison avec le problème du retard de la vision, posant maladroitement, en termes temporels, de multiples questions sur l'intervalle qui sépare deux jugements.

    Deux aspects d'une même réalité

    La fin de l'histoire est transcendante ; mais l'histoire elle-même n'aurait pas de sens si cette fin n'était déjà présente en elle et ne lui servait de critère. L'eschatologie chrétienne maintient une tension entre le Royaume toujours à venir et cependant déjà là. Elle croit à la réalité objective des événements derniers comme à l'actualité présente du jugement de Dieu. [369] La Tradition a progressivement dégagé l'eschatologie individuelle de l'eschatologie générale. La tentation serait plutôt aujourd'hui, passant en quelque sorte à l'autre extrême, d'absorber le général dans l'individuel jusqu'à ne plus voir dans la Parousie qu'un symbole de la réalité qui se révèle à la mort de chaque individu.

    Le jugement particulier et le jugement général sont les deux aspects d'une même réalité profonde. Nous ne disons pas : d'un même fait ; car ici et là on est hors du temps. Mais l'un et l'autre jugement se rapportent à des points de rupture différents de notre existence temporelle, de l'histoire de chacun de nous et de l'histoire du monde. Le jugement particulier porte sur une existence qui actuellement s'achève; le jugement général, sur l'humanité et le cosmos, en tant que tels, qui meurent pour ressusciter. Entre les deux, si l'on peut ainsi parler, et sachant qu'on parle ainsi du point de vue du temps - il y a la maturation du Corps mystique, l'espérance de la perfection de sa taille.

     

    Le Christ Juge

    C'est le Christ qui est notre Juge. le Jugement est, du point de vue de Dieu, ce qui, du nôtre, est option définitive. car l'option consiste à être pour ou contre le Christ. Nous reconnaissons, ou non, le Christ ; par suite, il nous reconnaît, ou non. Amici mei estis... Nescio vos...Ce sont les deux termes du jugement. C'est par rapport au Christ que l'homme est responsable. Par rapport à sa croix. Il est jugé sur l'attitude qu'il prend par rapport à sa Passion et à sa mort, c'est-à-dire par rapport à l'Amour car

    Il nous aime et nous a lavés de nos péchés par son sang, il a fait de nous un royaume de prêtres pour son Dieu et Père ; à lui donc gloire et puissance pour les siècles des siècles, amen. Voici qu'il vient, escorté des nuées ; chacun le verra, même ceux qui l'ont transpercé, et sur lui se lamenteront toutes les races de la terre. Oui, amen ! C'est moi l'Alpha et l'Omega, dit le Seigneur Dieu, Il est, Il était et Il vient, le Maître de tout (Apoc, 1,5-8)                     

                                               

     

    F. Varillon - Eléments de doctrine chrétienne tome 2 - Ed. de l'Epi DDB - 1961

     

     

  • l'éternité et un jour

     Le temps et l'éternité

    [363]

    Le temps n'est pas une réalité indépendante des êtres qui durent. Il n'est pas une sorte de réceptacle dans lequel se déroulerait leur devenir. Les êtres ne sont pas dans le temps: c'est le temps qui est en eux. Il y est comme la mesure de leur durée, s'ils sont matériels ou liés à la matière. C'est donc par son corps que l'homme est temporel.

    Au temps s'oppose l'éternité. On peut la concevoir d'abord comme une durée indéfinie et sans limite, un devenir sans termes, c'est-à-dire sans commencement ni fin. Platon et Aristote attribuaient une telle éternité au monde. Mais ce n'est pas une éternité qui s'oppose au temps : c'est bien plutôt l'éternité du temps. En effet, prolonger indéfiniment le temps n'affranchit pas du temps, n'exclut pas de l'existence les caractères qui sont propres aux êtres temporels, à savoir le changement, la succession, le devenir, la multiplicité. C'est pourquoi on ne pense correctement ni le temps  ni l'éternité, si l'on traduit graphiquement celle-ci par une ligne horizontale indéfinie, et celui-là par une section finie de cette ligne. 

    Pour concevoir intemporellement l'éternité, c'est-à-dire pour l'opposer réellement au temps, il faut [364] la définir comme une existence totalement et parfaitement présente à l'esprit et embrassée par lui. Ainsi transcendante au temps, affranchie des caractères du temps, hétérogène au temps, l'éternité ne lui est cependant pas étrangère : c'est elle qui lui donne sa consistance et sa densité spirituelle. Dieu est la Source de notre être  ; or notre être est temporel ; dire que Dieu est la Source de notre être, c'est donc dire équivalemment que l' Eternité est la source du temps. Le temps n'existe que par ce qu'il possède en lui d'éternité.

    Il faut donc penser l'éternité à partir du présent : sa représentation graphique la moins grossière serait une ligne verticale abaissée sur un point signifiant le présent. Ainsi peut-on comprendre qu'elle soit ce qui donne au présent - à mon présent - son poids, ce qui le gonfle de substance spirituelle. Ainsi peut-on comprendre aussi que le jugement, le ciel et l'enfer soient déjà présents au monde.

    L'imagination nous égare quand elle nous conduit à nous représenter comme temporels les événements qui constituent nos fins dernières. Notre mouvement instinctif est d'imaginer chacun de ces événements comme affecté d'une certaine durée qui se déploie dans un temps interne. Ainsi, disons-nous volontiers, l'âme "attend" au purgatoire  que sa purification soit achevée ; après quoi, "elle attend" au ciel la résurrection des corps. En outre, nous imaginons ces événements, ainsi déployés dans un temps interne, comme reliés les uns aux autres par un temps externe qui les englobe et les contient.
    Résistant à de tels entraînements, on peut comprendre, en fonction des distinctions ci-desus rappelées, certaines formules usuelles, comme " l'âme est jugée après la mort, purifiée après le jugement", etc. Elles ont d'abord, dans le langage du temps, un sens négatif. Elles signifient [365] que le jugement n'a pas lieu avant la mort, ni le purgatoire avant le jugement, que l'entrée au ciel ne précède pas le purgatoire, ni le jugement général la résurrection. Elles nient une antécédence temporelle de tel événement par rapport à tel autre. 

    Mais en outre, et positivement, elles affirment un rapport de dépendance entre tel événement et tel autre. Ainsi : la mort est la condition du jugement, le purgatoire est la condition de la béatitude, la mort du monde est la condition de la résurrection.

    On ne peut aller plus loin.

    On ne peut pas dire : le jugement suit temporellement la mort et précède temporellement le purgatoire. Mais on ne peut pas davantage affirmer que les trois événements sont simultanés ; car un rapport de simultanéité implique, lui aussi, référence au temps.

    L'Eglise enseigne que la béatitude des élus et l'enfer des damnés sont éternels. Elle ne dit pas, pour autant, qu'il n'y a pas de différence entre l'éternité des créatures et l'éternité de Dieu. Seul l'Infini absolument infini est éternel absolument. L'éternité de l'homme divinisé est contingente et limitée. Limitée par une limite qui n'est pas celle du temps, et qui ne peut être que mystérieuse  à l'intelligence humaine actuellement soumise aux catégories de l'espace et du temps. Tout ce que nous pouvons dire, c'est que notre éternité est une participation à celle de Dieu, comme notre vie (de grâce et de gloire) est une participation à sa vie. Participation telle que l'activité du ciel ne se déploie pas dans le temps, ne se "déroule pas" - on dirait plus justement qu'elle "s'enroule", - ne se construit pas successivement et partie par partie.

    L'éternité  de l'enfer, affirmée par l'Ecriture (le feu qui ne s'éteint pas, le ver qui ne meurt pas, la chaos infranchissable), [366] a été niée à plusieurs reprises et de diverses façons. Les "conditionnalistes" (Arnobe) n'accordaient la survie qu'aux justes, et vouaient les "mauvais" à l'anéantissement. Les "restitutionnistes" (Origène) croyaient que tous les pécheurs seraient réintégrés dans le ciel. Contre ces théories et leurs survivances, l'Eglise a défini l'éternité de l'enfer, laissant à la réflexion théologique la tâche difficile d'en préciser l'exacte nature (...) C'est seulement en ce sens qu'il n'a pas de fin que l'on dit éternel le feu de l'enfer.... C'est pourquoi il n'y a pas de véritable éternité en enfer, mais plutôt un temps...).

     

                                                                          

    François Varillon - Eléments de doctrine chrétienne t2 - Ed le l'Epi DDB 1961

  • les fondamentaux (4)

    Note importante.

    Suite de l'enseignement du Père Molinié. La lecture de ce texte exige pour être compris de lire les 3 posts précédents qui font partie de la même conférence.

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    Et c'est justement là une des fautes de beaucoup de chrétiens de vouloir servir Jésus-Christ comme on sert les autres maîtres, avec beaucoup de générosité.  "Je donnerai ma vie pour toi", "oui, mais c'est pas ça que je te demande, je te demande de m'aimer" "mais qu'est-ce que ça veut dire enfin Jésus ? "C'est autre chose, nous allons nous expliquer là-dessus le jour où tu auras suffisamment séché dans l'attente (rires de l'auditoire).

    Alors, deuxième visite, en gros, deuxième conversion se caractérisant par la découverte de l'intimité avec Dieu. Je pense, j'espère  que pas mal d'entre vous, sinon toutes, sûrement toutes l'ont découverte, par conséquent sont capables d'apprécier la différence entre les deux, c'est quand même pas tout à fait la même chose. Donner toutes ses énergies à Dieu, c'est une chose, et c'est une chose surnaturelle  qui suppose déjà une lumière surnaturelle, mais découvrir que Dieu nous assiège d'un désir d'être dans une intimité perpétuelle avec nous, qui ne s'arrête à aucun moment, c'est encore autre chose, et c'est justement ce que Pierre a découvert à ce moment-là, au moment où il s'est effondré en larmes...... d'où une différence de ton dans la proclamation du programme lorsque, peu de temps après, le Christ lui demande : "Pierre m'aime tu ? " Car, à ce moment-là, il n'est plus question de claironner en majeur : "je donnerai ma vie pour toi" mais de murmurer en mineur : "tu sais bien que je t'aime". (...) Je n'élève plus la voix, je suis trop heureux de me taire à côté de toi. Tu m'as visité une deuxième fois.

    Et alors, quand on en est arrivé là,  on n'a encore rien compris... Voilà ce que nous dit la tradition de l'Eglise. Qu'est-ce qu'on n'a pas compris ? Ah voilà. Ce qu'on n' a pas compris c'est que cette intimité avec Dieu, que nous découvrons, que nous commençons à expérimenter, à laquelle nous voulons être fidèle, n'est en nous qu'une petite graine, la plus petite de toutes les graines et que, pour le moment, la situation des forces est nettement encore en faveur de quelque chose d'autre qui s'appelle la loi du péché, la loi de l'orgueil. Et qu'entre cet orgueil et cette douceur de l'intimité divine ce n'est pas la paix qui vient d'être déclarée, c'est la guerre, une longue guerre, une guerre d'usure. En un sens, après la première et même encore après la deuxième conversion, on a encore droit - vous comprendrez ce que je veux dire, on n'a jamais le droit de pécher - mais je veux dire on a encore le droit de commettre tous les péchés du monde tout en espérant être converti de la première et de la deuxième conversion.

    Seulement, alors réciproquement, ce n'est pas parce qu'on a connu la deuxième conversion, ou qu'on pense avoir connu l'intimité de Dieu, (je dis première, deuxième : attention à ne pas chercher de numéros dans vos têtes puisqu'il y en a en fait des multitudes de conversions) mais que ces trois paquets de conversions si vous préférez, trois séries de conversions, c'est une manière de mettre un petit peu d'ordre là-dedans, de reconnaître des phases plus décisives que les autres, eh bien même une fois qu'on a reconnu qu'il vous est arrivé quelque chose, ce n'est pas de la prétention  de la part de Pierre d'avoir pris conscience  qu'il s'est effondré en larmes au moment de la Passion et puis que depuis ce moment-là il est changé, oui, ça  il n'y a pas de doute il est changé, ce n'est pas de la prétention ni de l'orgueil que d'avoir constaté ça, que ce n'est plus le même qu'avant, probable qu'il devait le dire et le sentir. Eh bien si après ça Pierre s'était mis encore  à commettre des fautes graves, on aurait pu lui dire : qu'est ce que c'est cette histoire-là ? Tu prétends avoir le coeur changé ! Tu vois bien que tu continues comme avant ! Eh bien non ! c'est normal. Tout est possible, toutes les catastrophes sont encore possibles, tant qu'on n'a pas atteint la dernière conversion, celle que j'ai appelée "la mort du vieil homme", laquelle mort nous est administrée par l'amour de Dieu.

    Et alors, quoi faire ?

    Eh bien, comprenez-moi. Je vous dis : si vous êtes fidèle si peu que ce soit   au   petit programme de vie religieuse qui est le vôtre, soyez très modeste, très simple : Dieu va se déchaîner, voilà. Il va se déchaîner. Il va déchaîner sa douceur. Il ne va pas déchaîner sa violence. Mais il va avoir une action extraordinairement intense, une action de chirurgien extrêmement intense . Il va utiliser tout à votre service y compris et d'abord le démon et tout ce qui peut contrarier son action, c'est surtout ça qu'il utilise, c'est sa spécialité si je peux dire et c'est sa joie d'utiliser tout ce qui peut le gêner pour que ça aille encore plus vite. Ce n'est pas une raison pour vous mettre à pécher tranquillement, non. Vous me comprenez. Parce qu'il va utiliser aussi et d'abord et surtout l'attente fidèle, le désir sincère qui normalement doit se traduire par un certain effort pour ne plus pécher. Il va utiliser tout ça intensément. Alors je ne peux pas vous dire ce qu'il y a à faire sans avoir d'abord prévenu de ce qui va  se passer et à ce moment-là, une fois que je vous ai bien expliqué que Dieu va agir très intensément, je vous dis : l'essentiel c'est de vous adapter à cette action. Vous entrez à l'hôpital. Cette maison, comparons-là à un hôpital n'est-ce pas, hôpital spirituel. Vous entrez à l'hôpital parce que vous voulez servir Dieu, ou parce que, mieux encore, vous avez découvert que c'est dans cet hôpital que se développe l'intimité avec Dieu. Parfait. Alors vous arrivez là-dedans et vous demandez : qu'est-ce qu'il faut faire ? Faites attention ! Il y a des services qui fonctionnent dans cet hôpital. Ne vous imaginez pas que vous allez vous promener dans les jardins ou dans les salles comme ça. Vous allez subir un certain nombre d'interventions chirurgicales. C'est pour cela que vous êtes là quand même. Alors tâchez de ne pas trop faire attendre le chirurgien. "Oh là là, mais ces opérations, ça ne me rassure pas du tout !" (rires de l'auditoire). Eh bien vous avez la Sainte Vierge ; vous avez vos soeurs ; vous avez l'Eglise, vous avez les sacrements ; vous avez toutes sortes de gens et de choses qui sont là pour vous rassurer. Et puis vous avez les rayons. Ah c'est très important ça. Le service des rayons, c'est la prière : soigné aux rayons de l'amour de Dieu ! Et comme toutes les séances de rayon, c'est plutôt ennuyeux. On s'ennuie passablement. Alors on occupe le temps, on vous occupe le temps, au début, en vous remettant des prospectus sur la nature du traitement, c'est-à-dire qu'on vous explique ce que c'est que l'amour de Dieu, pourquoi Il a fait tout ça, ce que c'est que l'Evangile : vous avez de quoi vous occuper.

    C'est drôle bien sûr, mais c'est quand même tragique aussi de voir des gens qui passent leur temps à lire des prospectus, sans se douter qu'ils vont d'abord à la prière pour subir une REALITE et non une idée, et une réalité qui s'appelle : le rayonnement. Et qui normalement, si cette réalité existe, il doit y avoir un moment où l'on doit sentir que ça chauffe un peu et que ce n'est pas la peine de passer son temps à regarder les prospectus, mais qu'il vaut mieux se laisser pénétrer par cette chaleur de l'amour de Dieu, tout doucement, tout simplement. Tout ça sont des réalités, ce ne sont pas des idées.  Alors au début, quand le rayonnement est faible ou que la carcasse est encore trop épaisse pour sentir, pour être vulnérable à cette chose là, alors on prend des "albums illustrés" pour s'occuper comme dans la salle d'attente, c'est-à-dire on prend des livres de méditation, ça ne va pas plus loin. J'ai la plus grande estime pour la théologie, c'est ma spécialité, il faut bien que j'en fasse, mais qu'est-ce que dit saint Thomas ? A peu près la même chose que moi dans des termes pas plus nobles en fin de compte  : "de la paille ! Laissez- moi tranquille".

    Alors, voyez, c'est très décevant ma réponse, c'est très décevant,  mais c'est volontairement décevant. Si ça vous inquiète encore de ne pas savoir quoi faire pour atteindre cet amour de Dieu, c'est que vous n'avez pas encore compris à quel point Dieu vous aime. Alors j'essaye de vous le faire comprendre, de vous dire : renversons un peu les rôles, si vous voulez bien. Parlons de ce qu'Il fait Lui, même quand vous dormez. Alors, je vous en prie, réveillez-vous ! Précisément parce que la lumière approche, mais quelle  lumière ! Et alors ne vous demandez pas combien d'ampoules électriques  vont être nécessaires pour faire un effet de lumière  alors que l'Aurore arrive : tout vos efforts c'est ça : des petites loupiotes.  Qu'est-ce que c'est que cette histoire-là ? Les temps sont proches. Tout ça arrive à une terrible vitesse. En tout cas, dans votre coeur et dans votre âme, il est plus tard que vous ne croyez, comme le disait le Curé d'Ars, je crois. 

                                  A suivre.... je terminerai cet entretien très prochainement.