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La soif de Jésus et la nôtre

Nous crions que nous avons soif; nous nous pressons autour de toutes sortes de puits avec nos cruches pour recueillir un peu d'eau pour nous désaltérer. Or Jésus est là, il nous rencontre, et à notre cri il répond: moi aussi, j'ai soif. Il est venu parmi nous comme quelqu'un qui, lui aussi, connaît la soif. Nous sommes assoiffés de justice, disons-nous, mais ce Jésus l'a été plus que tous : «Je suis venu jeter un feu sur terre, et comme je voudrais qu'il soit déjà allumé » (Lc 12, 49). Nous sommes affamés de communion et de fraternité, mais ce Jésus n'a vécu que pour rassembler dans l'unité d'un même amour tous les hommes qui sont enfants de Dieu dispersés. Nous avons soif de divin, soif de la vraie vie, mais ce Jésus a laissé échapper la soif qui le dévorait: «Père, glorifie-moi de la gloire que j'avais auprès de toi avant que fût le monde» (Jn 17, 5).

Seulement, entre la soif de Jésus et la nôtre, quel abîme! Comme les Samaritains se contentaient d'un culte mélangé, nous nous contenterions si facilement de boire une eau boueuse. Nous nous contentons si vite des «à peu près» et les semblants de la justice, de l'amour, de l'adoration. Nous avons soif de justice, mais nous pensons que d'améliorer quelque peu le sort des plus malheureux, cela suffira. Nous  avons soif de communion fraternelle, mais pour les uns quelques relations polies au sein d'une Église très individualiste suffisent amplement, et pour les autres, un peu de chaleur collective dans une  bonne ambiance trompe trop aisément la soif. Nous avons soif de dépasser la banalité de notre vie superficielle, soif d'absolu, disons-nous, mais les succédanés modernes du sacré, les horoscopes et les fantasmagories de l'irrationnel suffisent amplement à beaucoup, tandis que les autres se consolent dans de vagues sentiments d'infini par la drogue, le naturisme ou la religiosité exotique.

Jésus a soif avec nous, parmi nous, mais autrement que nous. La seule justice accomplie sera pour lui celle qui pourra s'appeler véritablement Royaume de Dieu: et tant que ce Règne ne sera pas advenu, il y aura pour lui travail et labeur: « Mon Père travaille toujours, et moi aussi je travaille» (Jn 5, 17). La seule fraternité solide sera celle qui sera scellée dans l'amour de l'unique Père des hommes, et pour cela il livre sa propre vie et, comme signe de ce don, il nous laisse le sacrement du pain et du vin que nous célébrons en mémoire de lui. La seule adoration digne de l'homme et digne de Dieu est celle qui se réalise  «en esprit et en vérité», dit-il à la Samaritaine, et seul son Esprit peut l'inspirer dans le cœur et l'exprimer dans le culte.  

Albert-Marie Besnard - Il vient toujours - Cerf 1979 pp. 44-46

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