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décision

  • A toi, qui que tu sois...

    Textes tirés du livre " Amour sans limites " par Un moine de l’Église d' Orient - Ed. Chevetogne 1971

     

    7

    Qui que tu sois, quel que tu sois, dit le Seigneur Amour, sur toi ma main en ce moment se pose.

    Ce geste veut te dire que je t'aime et que je t'appelle.

    Jamais je n'ai cessé de t'aimer, de te parler, de t'appeler. C'était parfois dans le silence et la solitude. Parfois là où d'autres étaient réunis en mon nom.

    Cet appel, souvent tu ne l'as pas entendu, parce que tu n'écoutais pas. Souvent aussi tu le percevais, mais d'une manière vague et confuse. Parfois tu étais tout près de me donner la réponse qui accepte. Parfois tu m'as donné cette réponse, mais sans conséquence durable. Tu t'attachais à l'émotion de m'entendre. Tu reculais devant la décision.

    Jamais encore tu ne t'es mis définitivement, d'une manière totale et exclusive, aux écoutes de l'Amour.

    8 Voici que maintenant encore, je viens à toi. Je veux te parler encore. Je te veux tout entier. Je le répète, l'Amour te veut d'une manière totale et exclusive.

    Je te parlerai en secret, en confidence, intimement. Je mets ma bouche tout près de ton oreille. Écoute ce que mes lèvres vont te dire à voix basse, ce qu'elles veulent murmurer pour toi.

    Je suis l'Amour ton Seigneur. Veux-tu entrer dans la vie de l'Amour ?

    Il ne s'agit pas d'une atmosphère de tendresse attiédie. Il s'agit d'entrer dans l'incandescence de l' Amour.

    Là est la vraie conversion, la conversion à l'Amour incandescent.

    Veux-tu devenir autre que celui que tu as été, que celui que tu es ? Veux-tu être celui qui est pour les autres et d'abord pour cet Autre et avec cet Autre par lequel chaque être a l'existence ? Veux-tu être le frère universel, le frère de l'univers ?

    Écoute ce que mon Amour voudrait te dire.

     

     

  • Chemin vers Pâques (21)

    [20]

    La troisième pâque de l'histoire est la nôtre. Il y a autant de pâques qu'il y a d'actes libres, d'élections, pour prendre le mot des Exercices [voir les Exercices spirituels de st Ignace, surtout les numéros 169-188), de décisions où l'on meurt à son égoïsme. Le fond des choses, c'est que chacune de nos décisions a une structure pascale. Chacune de nos décisions est une mort. Il faut mourir à son égoïsme, au regard sur soi, au souci de soi, pour s'occuper des autres tout simplement. C'est donc une mort ; notre foi est que cette mort est une résurrection.

    Tout est dans la décision, tout est là. Et quand nous disons que c'est la décision qui nous construit pour la vie éternelle, c'est vrai en rigueur de termes. Et cette décision a nécessairement une structure pascale. C'est une mort et c'est un passage au Christ. A tout instant, dans chacune de nos décisions, nous passons au Christ pour vivre éternellement d'une vie christifiée. Cela est la base de toute l'éducation de l'enfant : valeur du don, valeur de la décision, mourir à soi-même.

    Ne faisons pas les malins. Les chrétiens n'ont pas le privilège de la mort à soi-même. Il faut y aller doucement. Nous employons ce mot-là que d'autres n'emploient pas. (...) [21] (...) Nous n'avons absolument pas le monopole, mais nous croyons - et c'est cela  le message de l'Evangile - qu'en mourant à soi-même on passe au Christ, on vit de la vie même du Christ, on est christifié, on est divinisé. Et cette foi devrait nous donner l'énergie de nous trouver au premier rang toutes les fois qu'il faut mourir à soi-même pour faire un peu plus de justice et un peu plus de bonheur sur terre. Le scandale, c'est que notre foi, qui est la foi en la résurrection, c'est-à-dire dans le passage au Christ au coeur même de nos décisions, que cette foi-là ne nous donne pas l'énergie d'aller toujours au premier rang de ceux qui mènent le combat fraternel humain.

    Voilà qui répond à des tas de questions qui nous sont posées : qu'est-ce que la foi ajoute ? On entend cela continuellement. Les jeunes demandent : " Ca résout quoi la foi au Christ ?" Il n'y a pas autre chose à répondre. Croire que toute mort est une résurrection, et pas n'importe quelle résurrection, mais le passage au Christ même, à sa vie pour l'éternité. C'est cela qui devrait faire que les chrétiens aient toutes les initiatives, qu'ils soient au premier rang du combat. (...)

    Mais quand il s'agit de sacrifice, autrement dit de mort à soi-même, c'est maintenant. Je ne passerai pas au Christ après ma mort, j'y passe dans chacune de mes décisions. [22] Et à la mort, qu'est-ce qui se passe ? A la mort, je découvre que je suis devenu Christ par toute ma vie. Voilà ce qu'on peut dire pour comprendre le mystère pascal. Il ne faut pas séparer notre vocation à la divinisation de ce mystère de mort et de résurrection.

    François Varillon - La Pâque de Jésus - Ed Bayard 1999

     

  • Croire en Dieu : qu'est-ce à dire ? (1/3)

    [18] (...)

    Je crois en Dieu... Mais, qu'est-ce que la foi ? Si l'on se demande ce que signifient ces mots, si l'on envisage de l'extérieur, pour ainsi dire, cette affirmation - Je crois en Dieu - elle devient énigmatique, alors que nous avions auparavant l'impression de la comprendre.

    Il est évident que la foi est autre chose que la connaissance, du moins que la connaissance au sens usuel du terme. Si je dis Je crois en Dieu, ou en d'autres termes, je sais que Dieu existe, ce savoir n'est en rien comparable au fait de savoir que dans ma chambre il y a une table ou bien que dehors il pleut. Cette dernière connaissance, que nous appelons objective, ne dépend pas de moi, elle pénètre dans ma conscience en dehors de ma volonté, de mon libre choix. Elle est réellement objective, et moi, comme individu, comme personne, je ne peux que l'accepter et la faire  mienne. Mais lorsque je dis Je crois en Dieu, cette affirmation exige un choix, une décision ; autrement dit, elle suppose une participation très personnelle de tout mon être. Mais dès lors que cette participation personnelle, que ce choix disparaissent, ma foi devient morte : elle est pratiquement inexistante. Or nous sommes loin de toujours croire véritablement ; c'est pourquoi nous ne pouvons pas [19] transformer notre foi en un élément objectif, toujours égal à lui-même, qui serait une partie intégrante de nos convictions ou de notre vision du monde. 

    Beaucoup de personnes s'adressent à Dieu dans la peur, le malheur, la souffrance, mais dès l'instant où ces difficultés disparaissent, elles retournent à une vie qui n'a plus rien à voir avec la foi, comme si Dieu n'existait pas. Plus nombreux, encore, sont ceux qui ne croient pas tant à Dieu mais qui ont foi en la religion aussi bizarre que cela puisse paraître. Ces personnes se sentent bien à l'église. La plupart d'entre elles sont habituées, depuis leur enfance, à cette sacralité de l'église, des rites religieux. Là, tout est beau, bon, profond, mystérieux : ce n'est pas comme dans le monde quotidien, laid et méchant. Et elles s'accrochent à cette religiosité sans jamais y réfléchir en profondeur. Mais tout cela n'a presque rien à voir avec la vie réelle. La religiosité apporte des émotions bonnes, pures, elle aide à vivre. Or là encore, la religion et la vie forment deux univers cloisonnés. Enfin, il y a une troisième catégorie de personnes. Ce sont celles qui considèrent que la religion est nécessaire à la société humaine, à la nation, à la famille, aux enfants, aux malades, pour affermir l'honnêteté et la morale ; celles qui, en d'autres termes, la réduisent à son utilité. Je me souviens, lorsque j'étais jeune prêtre, des mères s'adressaient à moi pour que je les aide, par la confession, à éradiquer chez leurs enfants tel ou tel mauvais penchant : " Dîtes à mon enfant que Dieu voit tout, alors il va avoir peur et ne fera plus telle ou telle chose..." C'est une religion qui aide, qui console, où le sacré, le sublime procurent un certain plaisir. C'est la religion "utile". Notons qu'il y a là une part de vérité. Mais réduite à cela, la religion n'est pas cette foi dont parlait l'apôtre Paul [les exégètes n'accordent pas la paternité de l’épître aux Hébreux à l'apôtre Paul, note du rédacteur de ce blog] , à l'aube du christianisme : "La foi est la garantie de ce qu'on espère, la preuve des réalités qu'on ne voit pas " (He 11,1).

    Essayons de réfléchir à ces paroles étranges : " la garantie de ce qu'on espère, la preuve des réalités qu'on ne voit pas". Expressions étranges, car chacune renferme, en apparence, une contradiction. En effet, si je suis en train d'attendre quelque chose, "d' espérer", c'est justement parce que cela n'est pas encore réalisé, sinon il n'y a plus rien à attendre. Quant à l'invisible, c'est-à-dire à ce qui ne peut être vérifié, comment pourrait-il être vu, reconnu, devenir en moi une certitude, pour ainsi dire une preuve, une [20] réalité, un bien que je possède ? Pourtant, c'est justement par ces paradoxes apparents que l'apôtre Paul définit la foi. On remarque d'abord que le mot Dieu est absent de cette définition. Il apparaîtra dans les versets suivants de son épître. Mais à ce stade, il parle de la foi comme d'un état particulier propre à l'homme, comme d'un don qu'il possède.

    De quel don est-il question ? On peut dire qu'il s'agit d'une aspiration, d'une attirance, de l'attente d'une chose désirée, du pressentiment d'une autre chose pour laquelle il vaut la peine de vivre.  Il est curieux de voir que Jean-Paul Sartre, philosophe athée, définit l'homme d'une façon presque identique : " L'homme est une passion inutile". Il définit cette passion, cette aspiration comme "inutiles" car, d'après sa conviction, elles sont illusoires puisqu'il n'y a aucun objet, vers quoi l'homme peut tendre. Il n'a rien à espérer, ni rien à attendre. Or ce qui est important, c'est que Sartre décèle aussi en l'homme une attente, une soif. Ainsi, la foi, pour en revenir à l'apôtre Paul, est une connaissance, une rencontre avec ce que l'homme attend, sans qu'il le sache toujours lui-même ; une aspiration et une soif qui déterminent sa vie. Sans cette soif, sans cette attente, il ne pourrait y avoir de rencontre. Si l'objet de cette soif n'existait pas, il n'y aurait pas non plus en l'homme, cette attente. Dans cette rencontre, l'invisible devient certitude, c'est-à-dire possession aussi du réel.

    Tout cela veut dire que, dans l'expérience chrétienne de la foi, cette dernière n'est pas simplement le fruit, la manifestation d'une connaissance, la déduction d'un raisonnement ou de vérifications ; ce n'est pas le résultat d'un calcul mental et, en même temps, ce n'est pas seulement une émotion religieuse, qui peut être présente un instant, puis disparaître dans la minute suivante. La foi est essentiellement une rencontre, la rencontre réelle de quelque chose de très profond en nous avec ce vers quoi est dirigée l'attente inhérente à tout être, même si l'homme n'en est pas conscient. C'est saint Augustin qui a le mieux exprimé ce qu'était cette rencontre, cette "garantie de ce que l'on espère" et la "preuve des réalités qu'on ne voit pas". "C'est pour Toi-même que Tu nous as créés, Seigneur, et notre cœur ne pourra se calmer en nous tant qu'il ne T'aura pas trouvé." Cela nous conduit au troisième mot, le plus mystérieux de notre confession de foi : Je crois en Dieu ; cela nous amène au mot Dieu.

                                                                   A suivre...

    Alexandre Schmemann - Vous tous qui avez soif - Ed YMCA-Press - F.X de Guibert  - Paris 2005 - ISBN : 2-85065-xxx-x & 2-7554-0032-3