Un ancien a dit : « Si tu vis dans la solitude du désert, ne crois pas que tu accomplisses quelque chose de grand ; considère-toi plutôt comme un chien chassé du village et que l’on a enchaîné, parce qu’il mordait et s’attaquait aux hommes. » (Apophtegme)
On parle beaucoup aujourd’hui de défense de l’environnement. Nous ne voulons pas polluer l’environnement avec nos déchets. Les Pères du désert avaient à l’esprit la défense de l’environnement spirituel et émotif. Ils ne voulaient pas polluer le monde avec leurs problèmes irrésolus et leurs émotions confuses. Ils savaient avec certitude que, à travers chacune de nos paroles et de nos actions, nous produisons un effet sur le prochain.
Si nous insultons les autres sans mesure, si nous diffusons nos préjugés par notre manière de parler, nous empoisonnons notre environnement humain. Et cela est tout aussi nocif que la pollution des ressources naturelles. Dans de nombreuses familles, communautés ou entreprises, le climat est tellement perturbé sur le plan émotionnel qu’il rend malade les personnes qui en font partie. Mais si nous purifions nos propres émotions, l’atmosphère en est assainie et cela procure la joie de notre âme.
Pour ne pas polluer le monde avec leurs émotions et leurs instincts agressifs, avec leurs désirs inconscients et leurs passions refoulées, les moines du quatrième siècle se sont retirés dans la solitude. Ils voulaient protéger les autres de leurs névroses irrésolues. Ils allèrent au désert pour y vaincre les démons.
De cette manière - pensaient-ils - le monde deviendrait plus et plus lumineux. Si le désert hostile pouvait devenir habitable grâce à leur amour, toute la terre pourrait se ressourcer, au point de devenir une demeure dans laquelle l’homme se sente chez lui.
La voix du désert – Anselm Grün – Parole et Silence, 2006