A Scété, un frère vint trouver l’abbé Moïse pour lui demander une parole. – « Reste assis dans ta cellule, lui répondit-il, elle t’enseignera tout » (Apophtegme)
S’asseoir dans le kellion, la cellule monacale, était pour les abbés un important exercice spirituel. Ils pouvaient même affirmer : « Il n’est pas nécessaire que tu accomplisses quelque œuvre de piété. Tu n’as pas à prier ou à jeûner. Reste simplement dans ta cellule. Ne précipite pas ton corps au-dehors de ta cellule. La chose fondamentale est que tu ne t’enfuies pas devant toi-même, mais que tu restes devant le Seigneur tel que tu es. »
Je te propose l’exercice suivant : assieds-toi dans ta chambre pendant une demi-heure. Ne prends aucun livre en main, même pas la Bible. Ne pense pas à quelque chose de spécifique. Ne médite pas et ne récite aucune prière. Assieds-toi simplement devant le Seigneur, en observant ce qui se réveille en toi. Les moines qualifient cet exercice de nêpsis, de « vigilance ». Ils comparent le moine à un pêcheur qui attend sur sa barque que l’eau se calme autour de lui, afin de voir les poissons monter à la surface de l’eau transparente et réussir à les attraper. Tu peux de la même manière attendre dans ta chambre que l’eau devienne autour de toi calme et transparente. Tu reconnaîtras alors ce qui vient à la surface en toi. Puis tu t’en saisiras et tu l’offriras au Seigneur. Tu sauras quels sont les poissons qui peuvent te nourrir et quels sont ceux que tu dois rejeter à l’eau.
C’est un exercice facile. Mais tu t’apercevras qu’il n’est pas si simple que cela. Tu t’assieds devant Dieu sans protection. Récemment, lors d’un cours, j’ai invité les participants à faire cet exercice. Pour beaucoup cela a été une expérience de grande importance. Ils ont découvert des aspects d’eux-mêmes qu’ils n’avaient décelés jusqu’à présent ni dans la prière ni dans la méditation. Et ainsi, sans défense comme ils l’étaient, ils sont arrivés d’un coup très près de Dieu. Ils ont découvert la vérité sur eux-mêmes et ils se sont sentis complètement aimés de Dieu. Cela les a libérés et remplis d’une paix profonde.
La voix du désert - Anselm Grün - Parole et Silence, 2006