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Est-il le Messie promis ?

Le Dieu dont Jésus témoigne n'est plus menaçant. Jean annonçait un Dieu qui punit, Jésus, lui, manifeste un Dieu de compassion et de miséricorde. La différence est telle que dans sa prison le Baptiste s'interroge : Jésus est-il vraiment celui que Dieu a promis? est-il l'Attendu? On perçoit à cette interrogation combien Jésus bouleverse les idées reçues. Il se veut le témoin non d'un Dieu qui exige, mais d'un Dieu qui propose ; non d'un Dieu lointain, accessible par le truchement de médiations complexes, telles la Loi ou les coûteux sacrifices du temple de Jérusalem, mais d'un Dieu qui s'invite; non d'un Dieu qui condamne, mais d'un Dieu qui fait grâce, d'un Dieu qui aime et protège toute vie sortie de ses mains. Nous le voyons, dès le début des évangiles tout est dit du Dieu, révélé par Jésus, son Fils. Il apparaît discrètement  au milieu des pécheurs, puis se met en route pour les trouver et les sauver. C'est cette même discrétion que nous allons observer dans son action, où se manifeste la puissance divine, mais sans contrainte. Cette discrétion ne nous présente pas un Dieu faible; tout le paradoxe est là : Dieu se manifeste dans la faiblesse, mais il reste un Dieu fort. Sa force n'est pas celle prônée par les pharisiens, les sadducéens, les esséniens, les violents, ni même par Jean-Baptiste. Il s'agit bien d'un règne qui vient, mais autrement qu'on l'imagine. S'il est un Dieu qui pardonne, il se manifeste au milieu d'un groupe de pécheurs qui se convertissent. S'il est bien le Maître qui accomplit toute justice, c'est comme disciple qu'il entre en scène.

Au reste, si Jésus n'avait pas manifesté un Dieu fort, il n'aurait pas fait peur aux puissants et l'on n'aurait pas cherché à l'éliminer. Il n'est donc pas nécessaire de faire un tri dans les évangiles pour parler de la discrétion de Dieu. D'un bout à l'autre c'est bien le même Dieu qui se révèle. Sa discrétion n'invite pas à la résignation ou a une douceur mièvre. Elle désoriente pour nous fait découvrir que la force de Dieu est autre que ce que nous pensons, et se manifeste ailleurs que là où nous l'attendons. 

Bernard Rey - La discrétion de Dieu - Cerf 1997, pp. 52-53

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