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Les évangiles ne sont pas des reportages

Pour le dire de façon un peu abrupte : sauf en de très rares exceptions, les évangélistes s'intéressent peu aux sentiments personnels de Jésus. Leurs récits ne sont pas des reportages, tels qu'on peut en lire aujourd'hui dans les magazines, mais des œuvres théologiques, destinées à édifier la foi des communautés, en leur présentant le dessein sauveur de Dieu, réalisé dans la vie, la mort et la résurrection du Christ.

Les détails, apparemment croqués sur le vif, ont une signification théologique et sont destinés non à alimenter notre curiosité mais notre vie spirituelle. Quelques exemples suffisent à le montrer. - Quand les récits de la multiplication des pains précisent qu'il y a de l'herbe (Mc 6, 39 par.) voyons dans ce détail non le souvenir d'un témoin, mais une référence au psaume 22 (Le Seigneur est mon berger) où il est écrit : "Sur des prés d'herbe fraîche il me fait reposer". La mention de l'herbe verte selon saint Marc, propose une lecture messianique de l'épisode. - De même, quand Jean précise que les pains  sont d'orge , comprenons qu'il établit une relation entre cet épisode et la multiplication des pains réalisée par Élisée où, effectivement, il est question de pains d'orge (2 R 4,42)    - Donnons un dernier exemple, tiré cette fois des récits de la Passion. Lors de la comparution de Jésus devant Pilate, Jean écrit que Pilate fit asseoir Jésus sur le tribunal (Jn 19,13). C'est exactement le sens de la phrase grecque. Des traducteurs ont trouvé cela historiquement invraisemblable. On lit ainsi dans  la Traduction œcuménique de la Bible (TOB) : "Pilate le fit asseoir sur l'estrade" (le tribunal est changé en estrade, ou tribune selon d'autres). Sœur Jeanne d'Arc traduit de son côté : "Pilate s'assoit sur le tribunal" (on garde "tribunal" mais on change "faire asseoir" en s'asseoir). La Bible de Jérusalem a heureusement conservé le sens  du grec (Pilate le fit asseoir sur le tribunal). C'est historiquement invraisemblable, mais logiquement d'une grande vérité. Pour Jean, qui veut situer ses lecteurs à ce niveau , le véritable juge, au cours de ce procès, c'est Jésus  car il est le  Fils de l'homme (Mt 16, 27, etc) Voilà une lecture en profondeur dont Jean a le secret et qu'il exprime ici par un retournement de situation : la Passion de Jésus met en jugement le monde et ceux qui condamnent Jésus. (...)

Bernard Rey - La discrétion de Dieu - Cerf 1997, pp. 76-77

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