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ministères

  • le signe premier du baptême

    (...) le signe premier du baptême tient dans le passage, à travers l'eau et la profession de foi, des ténèbres à l'illumination. Le fait était d'autant plus explicite que les petits groupes chrétiens vivaient au milieu de populations païennes.

    Dans un nouveau contexte où les chrétiens apparaissent majoritaires, les propos de saint Augustin prennent sens. En effet, Augustin et ses disciples "rééquilibrent" le baptême en insistant beaucoup plus sur le fait que le baptisé est purifié du péché originel. Le passage ne sera plus visible puisque socialement tout le monde est chrétien ; il devient intérieur, théologique, spirituel ou moral. Il se produit ainsi un déplacement d'accent. On a vécu pendant des siècles sur cette idée que, vivant en majorité chrétienne, en chrétienté, surtout chez nous, le baptême était le sacrement absolument indispensable pour être purifié du péché originel et pour échapper - on citait à tort, à mon avis, Augustin - à la massa damnata. Pour Augustin, il s'agissait d'échapper à l'indistinction, à ce qui n'a aucune signification, pour être identifié comme enfant du Père. Mais c'est devenu : " Il faut échapper aux tourments éternels en étant baptisé." L'Eglise, dès lors, n'était plus le sacrement du salut, elle était l'appartenance exclusive au salut. Apparaissent alors des phénomènes assez étranges, par exemple des enfants qui mouraient, qui ressuscitaient pour être baptisés et qui remouraient ! Avec, dans certaines églises, des autels consacrés au dépôt de ces petits corps, de ces petits cadavres, uniquement pour le baptême. On les appelait des "autels à répit", à rémission en fait. C'est une conception du baptême qui s'explique historiquement mais qui, en quelque sorte, rééquilibre autrement ce que l'Antiquité chrétienne avait posé en premier. Or aujourd'hui, nous sommes dans la même situation que celle des premiers temps, quand des adolescents, des jeunes, des adultes demandent le baptême. C'est vraiment ce passage-là qu'ils entendent faire. Il y a eu conjointement une autre évolution. Adhérer à la perspective de mourir sans baptême était impensable. Il y a d'ailleurs encore des parents qui disent : "Il faut le baptiser pour le cas où il lui arriverait quelque chose." On voit donc le baptême comme une protection, avouons-le, contre un certain nombre de maladies infantiles. C'est comme cela qu'il est encore perçu parfois.

    Mais il y a plus grave encore. On a eu une individualisation croissante des baptêmes qui sont devenus la fête familiale de la naissance de l'enfant, avec évidemment les contrefaçons : baptême républicain, baptême social, etc. (...) Nous sommes dans cette situation aujourd'hui où ce n'est pas le passage dans la vie du Christ qu'une sorte de protection, comme une médaille tutélaire, qui permettra à la famille de dire : "Nous avons tout fait." On évacue l'appartenance à l'Eglise. (...) Les familles font une fête privée, et la communauté qui devrait accueillir, se sent au contraire comme non autorisée à rentrer dans cette fête qui la concerne au premier chef. (...)

    Albert Rouet - j'aimerais vous dire - Bayard 2009, pp. 249-251