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Commentaire du Notre Père (2)

Extrait du livre : "Toi, notre Père" P. Thomas DEHAU (1870-1956) - Ed Saint Paul 1992

 

15

Que ton Nom soit sanctifié

 

Nous l'avons vu, le Pater  nous enseigne non seulement ce que nous devons demander, mais ce que nous devons désirer. Quels sont les objets que nous devons mettre dans nos désirs avant les autres ? Ceci est très pratique, car, n'étant pas assez spirituels, il nous arrive de ne pas mettre Dieu avant tout. Or, c'est Dieu même que nous devons demander premièrement.

Il semble que demander son pain soit bien permis à un mendiant. Et pourtant, Jésus nous apprend ici à demander bien d'autres choses avant notre pain. Nous avons toujours tendance à désirer qu'il s'agisse d'abord de nous, alors que, comme le disait sainte Jeanne d'Arc, il faut qu'il s'agisse d'abord de Dieu : " Messire Dieu premier servi."

Avant de demander notre pain, c'est le pain de Dieu qu'il faut demander ; le pain de Dieu, c'est son 16 règne, c'est sa volonté. Il faut demander ce pain éternel. Une âme ardente désire surtout le règne de Dieu.

Cette première demande regarde Dieu en lui-même. Il y est question de la gloire essentielle de Dieu. Souvenons-nous que toute activité, même au service de Dieu, doit passer après cette chose, la plus importante de toutes, qui est la sanctification du Nom de Dieu.

Vous me direz : le Nom de Dieu est infiniment sanctifié ; il y a le ciel, le ciel que le prêtre entrouvre au commencement du Canon [c'est la Prière eucharistique] qui se termine par le Pater ; le prêtre passe la revue des hiérarchies angéliques, des chœurs des bienheureux, des saints, c'est une lyre merveilleuse, une harpe sans fin. Tous sanctifient le Nom du Seigneur ; de tous ces saints monte une louange immaculée ; toutes ces voix sont autant de flammes d'amour, elles célèbrent la grandeur de Dieu dans une "allégresse sociale", socia exultatione. Le prophète Isaïe a entendu les Séraphins crier les uns aux autres la sainteté de ce nom, Sanctus, sanctus, sanctus (Is 6,3); et ils se voilaient la face et les pieds de leurs ailes ; ils s'abîmaient dans une humilité sans bornes devant la gloire de leur Dieu.

17 Mais ce ne sont pas seulement les anges qui rendent gloire ainsi ; l'homme qui, par sa nature, est inférieur à l'ange, peut s'élever par la sainteté au-dessus des hiérarchies angéliques. Voyez la Très Sainte Vierge ! tous les concerts angéliques n'égalent pas le Magnificat de la Mère de Dieu.

Voilà donc la musique qu'a Dieu à sa disposition : c'est une louange qui correspond adéquatement à la gloire de son Nom.

Après avoir essayé d’entrouvrir le voile qui nous cache ces merveilles, si nous redescendons vers notre petite planète, écoutez ce cri de l'humanité, ce cri qui monte des abîmes ; c'est le contrepied absolu de ce que nous venons d'entendre. Qu'est-ce que les hommes se crient entre eux ? Certes, il y a divers cris ; mais je fais la moyenne, et je dis : ce que les abîmes de l'humanité crient, c'est le blasphème. Un petit nombre de voix chantent la gloire de Dieu ; elles la chantent mal en comparaison du chœur des anges et des saints. Mais tant d'hommes crient le blasphème ; ce qui résout toutes les cacophonies, c'est le blasphème, quelle que soit la manière dont il se décore ou se barbouille : blasphème élégant, littéraire, artistique, blasphème grossier, fangeux ; c'est toujours lui, et tout le blasphème volontaire, si Dieu n'écoutait que sa colère et sa justice, mériterait l'anéantissement du monde.

18 Ce qui importe pour nous c'est de ramasser ce Nom divin pour lui rendre un peu de cet honneur infini que lui dérobe follement l'humanité. Il faut que, sur notre pauvre terre, il y ait un hosanna qui monte aussi haut que possible des abîmes non plus du mal, mais de l'humilité. L'abîme du mal est un abîme qui se voile d'orgueil, tandis que l'abîme d'humilité s'épanouit. Humilité des saints, humilité de la Très Sainte Vierge, de Notre-Seigneur lui-même, c'est de cet abîme-là que monte la réponse au cri de blasphème universel. Sans la sonorité de cet abîme, la louange n'aurait ni élan ni écho.

Que faut-il donc demander avant tout à ce Dieu qui est notre Père ? " Seigneur ! qu'il y ait dans notre pauvre humanité quelques voix très pures qui vous fassent oublier la voix du blasphème. Seigneur ! qu'il y ait des âmes contemplatives qui soient votre louange du jour et de la nuit ; qu'il y ait des prédicateurs qui annoncent la sainteté de votre Nom ; qu'eux aussi soient saints." Le prédicateur est l'homme des foules, mais il faut qu'en même temps il reste l'homme de la solitude, pour apporter aux foules le parfum du désert. Il faut prier, afin que le Seigneur trouve des adorateurs en esprit et en vérité, des prédicateurs de l'esprit et de la vérité.

Le Père cherche des adorateurs qui l'adorent en 19 esprit et en vérité. Ce Dieu, qui a à sa disposition les instruments d'harmonie ineffable que nous venons de dire, cherche cependant ; il y a des êtres que Dieu recherche. 

Dieu cherche t-il des intelligences, des volontés ? Certes, nous en aurions besoin à l'heure actuelle ; mais non, ce que Dieu cherche, ce sont des âmes qui l'adorent en esprit et en vérité. C'est ce que dit notre Seigneur à la Samaritaine après lui avoir révélé le don de Dieu. Toutes les fois que Dieu guérit et convertit une âme, c'est pour l'amener devant les mêmes horizons, c'est pour lui faire comprendre que l'essentiel est de procurer à Dieu la gloire de son Nom, de faciliter la victoire de son Nom.

Il faut ajouter ici que, dans cette première demande du Pater, nous prions pour que le Nom de Dieu soit sanctifié, sans excepter tout ce qui porte le reflet de ce Nom.

D'abord l’Église : notre Mère la sainte Église, et nos églises, les temples. Nous devons avoir un respect infini pour nos églises, selon la parole de Jacob : " Ce lieu est terrible, car c'est ici la maison de Dieu 20 et la porte du ciel". Il est un autre temple : nous-mêmes, car, nous dit saint Paul, l' esprit de Dieu habite en nous (1 Co 3,16) Nous devons avoir un très grand respect pour nous-mêmes ; respect pour notre corps : notre corps est le ciboire définitif. Vous savez que l'Eucharistie a été instituée pour nous, et que toute hostie consacrée est destinée à nourrir un corps humain. Respect pour notre âme qui est l'image du Seigneur et qui peut, qui doit être le réceptacle de la sainteté. Aucune âme, même celle du plus grand pécheur, du plus grand criminel, n'a le droit de désespérer de la sainteté.

Voilà donc, mes frères, tout ce que nous devons demander quand nous demandons la sanctification du Nom de Dieu. Plus que jamais nous avons besoin de prier. Les contemplatifs ne prient pas assez dans leur cloître, et nous surtout, ne prions pas assez.  

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