Série de textes tiré du livre de Bernard Bro, O.P : "On demande des pécheurs" Cerf, Ed 2007. Première édition 1969
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La première réponse...
[12] Un premier effort, plus facile et plus libérateur qu'on ne le pense dans la mesure où on l'accepte, consiste, au lieu de se bloquer sur ses culpabilités, à examiner les grandes responsabilités de sa vocation. Ce déplacement dans la question même est beaucoup plus fécond qu'on ne le suppose et il nous semble décisif, bien plus que tous les petits aménagements liturgiques qu'on pourrait faire.
En quoi suis-je pécheur par rapport à la vocation que Dieu me donne ? Je ne suis pas l'être évangélique que je devrais être. Je pressens des duretés, des replis sur moi ; je reçois de la réalité un certain nombre de gifles et je les récuse en accusant les autres au lieu de me demander si je ne suis pas le premier responsable. j'entends une vérité évangélique, et je vois bien que je me bats plus ou moins contre elle.
Par exemple, je puis être intellectuellement en harmonie avec certaines exigences comme la non-violence, ou la recherche de la paix, mais que fais-je concrètement ? Comment coopérer à cette recherche ? Je ne peux pas ne pas me sentir pécheur, du seul fait que je m'en désintéresse quand même un peu.
On pourrait faire les mêmes remarques sur la pauvreté. Si être propriétaire, selon l’Évangile, c'est être intendant pour les autres, que fait-on ?
De même de la vérité dans les contacts avec les autres. Je sens ce que devrait être la vraie clarté évangélique: "est est, non non". Il y a une fonction à remplir que je ne remplis pas, en face d'une opinion qui pense le contraire.
De même en face de cette grande responsabilité : [13] faire connaître le Royaume de Dieu... On s'habitue à l'état des choses, en souhaitant de ne pas en savoir trop et en acceptant de démissionner.
Il y a bien d'autres points dans nos responsabilités, nous nous y arrêterons plus loin. Il y a bien sûr, plus grave, mais ces exemples nous montrent que la réponse à la première question : " Où suis-je fautif ? " est possible, même si à certains moments elle est très complexe. Ceci nous semble être une première réponse essentielle et plus indispensable aujourd'hui que jamais. (...)
Reste l’insatisfaction de fond dont nous avons parlé, et cette angoisse que le sacrement, même amélioré, ne résout pas forcément. Si le pardon met en question la présence même de Dieu et si nous ne pouvons pas être en paix en dehors de cette présence, il est alors impossible de parler du pardon sans se situer en face de l'angoisse fondamentale qui constitue la personnalité et le mystère de chacun, au-delà de toute peur et de toute anxiété : ce qui, pour nous, semblait exister, ce désir, ce goût pour les créatures, ce besoin d'être en sécurité avec nos " idoles " ; cela même sur quoi nous nous appuyions, nous apparaît un jour vide ou factice... et alors tout est ébranlé. C'est alors que l'angoisse " surgit en nous lorsque fait défaut l'appui d'un manque ". Chacun de nous découvre que ce sur quoi il s'appuyait peut être insatisfaisant. (Et, le plus souvent, c'est le péché qui nous le révèle.)
C'est ici la première et dernière expérience de tout homme, depuis sa naissance à la conscience , jusqu'à [14] la mort ; or Dieu y répond. Mais peut-être trop discrètement et, hélas ! les hommes ont sans doute rétréci la réponse avec un règlement de la confession. " Je vais les mettre dans l'angoisse afin qu'ils me trouvent ", dit Dieu au prophète Jérémie. Qu'est-ce-à dire ?
La deuxième réponse : un milliard de francs lourds...
P. Bernard Bro
A suivre...prochain post