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apparitions

  • L' apparition mariale à Pontmain le 17 janvier 1871 (3)

    Ce texte est extrait du livre "Dictionnaire des Apparitions" pages 746 et sv. (lien ICI) paru aux éditions Fayard.

     

    (suite)

    Il arrive avec ses deux filles et, dans ses bras, le troisième, Auguste, âgé de quatre ans. Comme les deux autres petits, il regarde vers la maison Guidecoq et dit tout bas : " Je vois."

    - Qu'est-ce que tu vois ?

    - Une belle dame, une robe bleue, avec des étoiles comme dans l'église , [...] belles !

    - Tu ne sais pas seulement ce que c'est que du bleu.

    - Si, le dimanche j'ai un gilet à manches bleues.

    Cela conforte l'opinion générale, mais le charpentier n'est pas convaincu.

    - Est-ce qu'on peut se fier à un enfant de cet âge ! Il est comme tous les enfants, il répète ce qu'il entend.

    Et à l'enfant dans ses bras :

    - Regarde, mais ne dis plus rien.

    L'apparition n'a pas parlé. Elle n'ouvrira pas la bouche, mais le message d'actualité est entré dans les cœurs. Les enfants sautent de joie, battent des mains et répètent plusieurs fois : " Oh ! quelle est belle ! " " Ah ! si j'avais des ailes !" Ils sautent de joie  comme pour s'envoler vers le ciel.  " Jamais on a rien vu de pareil, ni en personne, ni en image", conclura l'un d'eux.

    Le message est terminé, mais voici un nouveau signe : les enfants le décrivent : " Un grand crucifix apparaît dans le ciel. Notre-Dame le tient devant elle, à deux mains, légèrement incliné. Une croix d'environ 40 centimètres", ont-ils évalué. En haut, un écriteau est fixé : " JÉSUS-CHRIST "; rouge, couleur du sang versé durant la Passion et aujourd'hui dans la guerre qui déferle. La foule chante le Parce Domine : Épargne, Seigneur !

    C'est le moment le plus poignant. La tristesse devient plus profonde sur le visage de l'apparition. Une étoile monte dans le ciel. Elle vient allumer successivement les quatre bougies de la mandorle. Notre-Dame salue cette lumière d'un nouveau sourire.

    Il est environ vingt heures trente : " Faisons tous ensemble la prière du soir" demande le curé.

    Pendant l'examen de conscience, avant l'acte de contrition, une dernière phase commence. Les enfants la décrivent au fur et à mesure : un grand voile blanc apparaît aux pieds de la Vierge. Il monte lentement  devant elle et la cache progressivement, de bas en haut  : " Comme si elle était entrée dans une poche ", dit Eugène (il prononce "pouche"). 

    Le voile s'arrête au bas de la couronne qui reste un moment seule visible et disparaît d'elle-même sans être recouverte, tandis que le cercle  et les quatre bougies s'évanouissent à leur tour.

    - Voyez-vous encore ? dit l'abbé Guérin

    - Non, monsieur le curé, c'est tout fini.

    Il est près de vingt et une heures. Chacun rentre chez soi, dans le recueillement et l'espérance. l'angoisse de la guerre s'est évanouie. Les Allemands ne viendront pas jusqu'à Pontmain. Tous les soldats du village  reviendront successivement sains et saufs. La joie est profonde et discrète. (...) 

     

  • Pourquoi cherchez-vous parmi les morts ?

    [146] (...) Le plus ancien témoignage pascal ne se trouve pas dans les évangiles. Il se trouve dans les épîtres de Paul, plus anciennes (de toute une génération) que l'évangile de Marc et représentant les documents les plus anciens du Nouveau Testament.

    Dès les années 55-56 en effet, l'apôtre Paul écrivait d' Ephèse, en Asie Mineure, à la communauté qu'il avait fondée à Corinthe. Dans cette première Epître aux Corinthiens, on trouve au chapitre 15, le plus ancien témoignage pascal "transmis" par Paul à la communauté de Corinthe lors de sa fondation et qu'il a lui-même "recu". D'après la langue, l'autorité et les personnes nommées, ce témoignage remonte probablement à la première communauté de Jérusalem. En tout état de cause, son origine se situe entre les années 35 à 45, date à laquelle Paul est devenu chrétien et missionnaire. Paul cite cette profession de foi et y ajoute une liste - que ses contemporains peuvent contrôler - de témoins de la Résurrection, [147] auxquels le Ressuscité "s'est laissé voir", "est apparu", "s'est manifesté", témoins donc trouvés au hasard des rencontres et dont la majorité étaient encore en vie dans les années 55-56.

    On peut constater des différences non seulement par rapport à l'évangile apocryphe de Pierre, mais même par rapport aux récits des évangiles canoniques. 

    Voici ce texte :

    " Je vous ai transmis en premier lieu ce que j'avais moi-même reçu, à savoir :

    que le Christ est mort pour nos péchés selon les Ecritures, qu'il a été mis au tombeau. Qu'il est ressuscité le troisième jour selon les Ecritures, qu'il est apparu à Céphas, puis aux Douze.

    Ensuite il est apparu à plus de cinq cents frères à la fois - la plupart d'entre eux sont encore vivants et quelques uns sont endormis. Ensuite, il est apparu à Jacques, puis à tous les apôtres. Et, en tout dernier lieu, il m'est apparu à moi aussi, comme à l'avorton." (1 Co 15, 3-8 ; cf. Ga 1,16 ; 1 Co 9,1)

    Les différences entre le plus ancien témoignage pascal et les récits plus tardifs sont patentes :

    - Les récits de la Résurrection dans les évangiles modifient de plus en plus ce premier témoignage et divergent sensiblement entre eux. Ce plus ancien témoignage pascal a la sobriété d'un procès-verbal.

    - Les récits des Evangiles ont nettement tendance à proposer une peinture légendaire (pour étonner l'auditoire). Paul, dans son témoignage, adopte le style d'une profession de foi ; il se peut qu'elle ait servi de résumé catéchétique, peut-être était-elle à apprendre par coeur lors du catéchisme.

    - Pour illustrer le message pascal, les évangiles mettent l'accent sur le tombeau vide. Chez Paul, par contre (comme aussi en d'autres écrits du Nouveau testamment), le tombeau vide (et les anges) ne [148] sont absolument pas mentionnés ; Paul insiste plutôt sur le fait que Jésus, vivant, a rencontré ses disciples.

    - Et tandis que les récits concernant le tombeau ne sont attestés par aucun témoignage direct, on trouve dans les épîtres de Paul (quelques décennies avant les évangiles) diverses déclarations où il parle lui-même d' apparitions, de manifestations du Ressuscité.

    Ce n'est pas à cause du tombeau vide, mais à cause des "apparitions" ou "manifestations" - sans doute visions ou auditions objectives ou subjectives, en tout cas appels à la prédication comme ceux lancés par les prophètes - que les disciples de Jésus vinrent croire à sa Résurrection pour la vie éternelle. La querelle à propos du tombeau vide est donc une fausse querelle. La discussion théologique a éclairci ce point : il est impossible de vérifier si le tombeau était vide. Des exégètes critiques eux-mêmes admettent comme possible que le tombeau ait été vide. Mais qu'est-ce que cela prouve ? Un tombeau vide n'est pas par lui-même une preuve de Résurrection. Il peut y avoir beaucoup d'explications (...) Car, quoi qu'on pense de l'historicité du tombeau vide, ni la Résurrection de Jésus ni la nôtre n'en dépendent.

    La reviviscence d'un cadavre n'est pas la condition préalable d'un éveil à la vie éternelle. Ainsi donc, pour Paul aussi, ce qui est capital pour sa prédication (et pour celle des épîtres du Nouveau Testament), ce n'est pas de montrer le tombeau vide, mais de prouver que Jésus est vivant. la foi chrétienne ne fait donc pas appel au tombeau vide, mais à la rencontre avec le Christ vivant en personne : "Pourquoi cherchez-vous parmi les morts celui qui est vivant ?" (Lc 24,5)

    La Résurrection n'est-elle donc pas un événement historique ? [149] Pour répondre clairement, je dirais : non, ce n'est pas un événement historique, et pourtant c'est un événement réel. Qu'est-ce à dire ?

                                                                               A suivre...

    Hans Küng - Vie éternelle ? Seuil 1985