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Les Admonitions de saint François d'Assise

Introduction

Le mouvement franciscain s'est répandu très rapidement sur les chemins de l'Europe. Il constitue un groupe en pleine expansion où affluent des personnalités très diverses et très contrastées. Dans ce bouillonnement de vie comment trouver la bonne direction ? Nous savons par les biographes que saint François, lors des Chapitres qui réunissaient les religieux, leur adressait des conseils ou admonitions. Cette composition orale se situerait vers la fin de la vie du saint, peut-être lors de son séjour à Sienne, six mois avant sa mort. Dans ces Admonitions, saint François éveille, corrige, touche la volonté et le cœur, suscite la prise de décision et le comportement adéquat, bref des conseils pour aider ses frères à ne pas s'égarer sur le chemin spirituel. Saint François, en maître spirituel, aide au discernement. Il s'agit bien de discernement car le serviteur de Dieu fait le bien, mais sous la motion de quel "esprit " fait-il le bien ? L'exaltation ou la non exaltation (orgueil ou humilité) qui suit le bien réalisé est révélateur du "bon esprit" ou du "mauvais esprit" qui habite l'auteur du bien réalisé. 

[D'après un document PDF du fr. Kolher ofm]

 

 

  1. Le Corps du Seigneur

 

Le Seigneur Jésus dit à ses disciples : « Je suis la voie, la vérité et la vie ; on ne va au Père que par moi. Si vous me connaissiez, vous connaîtriez aussi mon Père ; mais bientôt vous le connaîtrez, et d’ailleurs vous l’avez déjà vu. Philippe lui dit : Seigneur, montre-nous le Père, et cela nous suffit. Jésus lui répondit : Il y a si longtemps que je suis avec vous, et vous ne me connaissez pas encore ? Philippe, qui me voit voit aussi mon Père. »

Le Père habite une lumière inaccessible ; Dieu est esprit ; personne n’a jamais vu Dieu. Puisque Dieu est esprit, on ne peut donc le voir que par l’esprit, car c’est l’esprit qui fait vivre, la chair ne sert de rien. Il en va de même pour le Fils : en tant qu’il est égal au Père, on ne peut le voir autrement que le Père, autrement que par l’Esprit. Voilà pourquoi furent damnés tous ceux qui autrefois n’ont vu que l’homme dans le Seigneur Jésus-Christ, sans voir ni croire, selon l’Esprit et selon Dieu, qu’il est vraiment le Fils de Dieu. Pareillement sont damnés tous ceux qui aujourd’hui leur ressemblent : ils voient bien, sous forme de pain et de vin, le sacrement du Corps du Christ, consacré sur l’autel par les mains du prêtre au moyen des paroles du Seigneur : mais ils ne voient ni ne croient, selon l’Esprit et selon Dieu que ce sont réellement les très saints Corps et Sang de notre Seigneur Jésus-Christ, au témoignage du Très-Haut lui-même qui affirme : Ceci est mon Corps, et le Sang de la Nouvelle Alliance, qui sera versé pour la multitude, et encore : Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle. L’Esprit du Seigneur : il habite en ceux qui croient en lui; c’est donc lui qui reçoit le Corps et le Sang très saints du Seigneur. Tous les autres, ceux qui n’ont point part à cet Esprit, s’ils ont l’audace de recevoir le Seigneur, mangent et boivent leur propre condamnation. Race charnelle, combien de temps encore aurez-vous le cœur si dur ? Pourquoi ne pas reconnaître la vérité ? Pourquoi ne pas croire au Fils de Dieu ? Voyez : chaque jour il s’abaisse, exactement comme à l’heure où, quittant son palais royal, il s’est incarné dans le sein de la Vierge; chaque jour c’est lui-même qui vient à nous, et sous les dehors les plus humbles ; chaque jour il descend du sein du Père sur l’autel entre les mains du prêtre. Et de même qu’autrefois il se présentait aux saints apôtres dans une chair bien réelle, de même se montre-t-il à nos yeux maintenant dans du pain sacré. Les apôtres, lorsqu’ils le regardaient de leurs yeux de chair, ne voyaient que sa chair, mais ils le contemplaient avec les yeux de l’esprit, et croyaient qu’il était Dieu. Nous aussi, lorsque, de nos yeux de chair, nous voyons du pain et du vin, sachons voir et croire fermement que c’est là, réels et vivants, le Corps et le Sang très saints du Seigneur. Tel est en effet le moyen qu’il a choisi de rester toujours avec ceux qui croient en lui, comme il l’a dit lui-même : Je suis avec vous jusqu’à la fin du monde.

 

  1. Le péché de volonté propre

 

Le Seigneur dit à Adam : Tu peux manger des fruits de tous les arbres ; mais ne touche pas à l’arbre de la science du bien et du mal. Adam avait donc le droit de manger des fruits de tous les arbres du Paradis ; tant qu’il resta dans l’obéissance, il fut sans péché. Manger les fruits de l’arbre de la science du bien signifie : s’approprier sa volonté, s’attribuer orgueilleusement le bien que l’on fait, alors qu’en réalité c’est le Seigneur en nous qui l’accomplit en paroles ou en actes. Mais on préfère écouter les insinuations du démon, on enfreint la défense ; alors le fruit de la science du bien se transforme en fruit de la science du mal, et il faut en subir le châtiment.

 

  1. Obéissance parfaite et obéissance imparfaite

 

Le Seigneur dit dans l’Évangile : Celui qui n’abandonne pas tout ce qu’il possède ne peut être mon disciple ; et encore : Qui veut sauver son âme doit la perdre. Comment faire pour abandonner tout ce que l’on possède ? Comment perdre son corps et son âme ? En se livrant tout entier à l’obéissance entre les mains de son supérieur. Tout ce que fait et tout ce que dit un sujet est acte d’obéissance véritable à deux conditions : d’une part qu’il s’agisse objectivement d’une bonne action ; d’autre part qu’on soit sûr de ne pas aller contre la volonté du supérieur. Un sujet croit parfois sentir qu’une autre orientation serait meilleure et plus utile pour son âme que celle qui lui est imposée : qu’il fasse à Dieu le sacrifice de son projet, et qu’il se mette en devoir d’appliquer plutôt celui du supérieur. Voilà de la véritable obéissance, qui est aussi de l’amour : elle contente à la fois Dieu et le prochain. Mais si le supérieur donnait un ordre contraire au salut de notre âme, il faudrait refuser de lui obéir, sans pour autant, rompre avec lui ou le quitter. Encourrait-on les persécutions de certains à cause de cette attitude, on ne devrait que les en aimer davantage, pour l’amour de Dieu, car celui qui, bien loin de divorcer d’avec ses frères, préfère supporter leur hostilité, celui-là reste dans l’obéissance parfaite : l’obéissance qui va jusqu’à donner sa vie pour ses frères. Bien des religieux, malheureusement, s’imaginent découvrir qu’il y a mieux à faire que ce qu’ordonnent leurs supérieurs ; ils regardent en arrière et retournent à leur vomissement, c’est-à-dire à leur volonté propre. Ce sont des homicides, car leurs mauvais exemples sèment la mort dans beaucoup d’âmes.

 

  1. Ne pas s’approprier les charges

 

Ce n’est pas pour être servi que je suis venu, dit le Seigneur, mais pour servir. Quand on a reçu autorité sur les autres, on ne doit pas plus en tirer gloire que si l’on était affecté à l’emploi de leur laver les pieds. Etre plus désemparé de perdre un supériorat que de perdre l’emploi de laver les pieds, c’est amasser, comme Judas, un trésor frauduleux au péril de son âme ; et plus grand est le trouble, plus est coupable l’avarice.

 

  1. Ne pas s’enorgueillir, mais placer sa fierté dans la croix du Seigneur

 

Considère, ô homme, le degré de perfection auquel t’a élevé le Seigneur : il a créé et formé ton corps à l’image du corps de son Fils bien-aimé et ton esprit à la ressemblance de son esprit. Et malgré cela, toutes les créatures qui sont sous le ciel servent leur créateur mieux que toi, elles le connaissent et lui obéissent mieux que toi, chacune selon sa nature. Bien pis, ce ne sont pas les démons qui l’ont crucifié : c’est toi qui, avec eux, l’as crucifié et le crucifies encore en prenant plaisir au vice et au péché. De quoi peux-tu donc bien te glorifier ? Même si tu avais tant de pénétration et tant de sagesse qu’aucune science n’aurait plus de secret pour toi ; même si tu savais interpréter toutes les langues et scruter les mystères divins avec une subtilité remarquable, de tout cela tu ne peux tirer aucune gloire. Le premier venu des démons a autrefois pénétré bien plus avant dans les mystères de Dieu et connaît encore maintenant l’univers terrestre bien mieux que tous les hommes réunis (y compris celui qui reçut du Seigneur la grâce spéciale de la plus haute sagesse). De même, serais-tu le plus beau et le plus riche des hommes, et ferais-tu même des miracles au point de chasser les démons, tout cela peut se retourner contre toi, tu n’y es pour rien, et il n’y a rien là dont tu puisses tirer gloire. Mais ce dont nous pouvons tirer gloire, c’est de nos faiblesses. C’est de notre part quotidienne à la sainte Croix de notre Seigneur Jésus-Christ.

 

  1. L’imitation du Seigneur

 

Considérons, frères, le bon Pasteur : pour sauver ses brebis, il a souffert la Passion et la Croix. A sa suite, les brebis du Seigneur ont marché à travers les souffrances, les persécutions, les humiliations, la faim, les maladies, les tentations, et toutes sortes d’épreuves. En retour, elles ont reçu du Seigneur la vie éternelle. Nous devrions avoir honte, nous, les serviteurs de Dieu. Car les saints ont agi ; nous, nous racontons ce qu’ils ont fait, dans le but d’en retirer pour nous honneur et gloire.

 

  1. Savoir, mais pour mieux agir

 

L’Apôtre dit : La lettre tue, mais l’esprit fait vivre. La lettre tue ceux dont la curiosité s’arrête aux mots du texte ; ce qu’ils veulent, c’est paraître plus savants que les autres, et pouvoir acquérir ainsi de grandes richesses dont ils feront profiter leurs parents et amis. La lettre tue les religieux qui ne veulent pas approfondir l’esprit de la sainte Écriture, mais qui préfèrent s’en tenir uniquement à la connaissance et au commentaire des mots. L’esprit de la sainte Écriture fait vivre ceux qui n’attribuent pas à leur valeur personnelle la science qu’ils possèdent ou désirent posséder, mais qui, par la parole et par l’exemple, en font hommage au très haut Seigneur Dieu à qui appartient tout bien.

 

  1. Éviter le péché d’envie

 

Sans le secours de l’Esprit-Saint, dit l’Apôtre, nul ne peut dire : Jésus est le Seigneur ; sans le secours de l’Esprit-Saint, nul, pas un seul homme, n’est capable de faire le bien. C’est pourquoi celui qui est jaloux d’un de ses frères par l’intermédiaire duquel le Seigneur dit et fait du bien, celui-là commet un véritable blasphème : c’est au Très-Haut lui-même que sa jalousie s’en prend, puisque c’est de Dieu seul que dérivent toute bonne parole et toute bonne action.

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