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Pour converser avec le Maître (1) : introduction

Jusqu'à présent, vous avez surtout conçu la prière comme une pieuse obligation qui consistait dans la récitation, aussi attentive et loyale que possible, de formules apprises par coeur, ou lues dans un livre. Oui, sans doute, prier c'est un peu cela. Mais ce n'est pas que cela.

Voulez-vous une autre définition de la prière ? Je l'emprunte à sainte Thérèse d'Avila : " Prier, c'est converser cœur à cœur avec Dieu." Oh ! j'entends d'ici votre objection : " Converser avec Dieu ? Mais je ne saurais quoi dire... Je me trouverais très vite à court, surtout en face d'un interlocuteur muet !"

Muet ? D'abord, pas tant que cela. Sans doute Il ne vous parlera pas par bruit de paroles qui frappent vos oreilles. Mais Il a d'autres moyens de faire passer en vous ses idées. Croyez-vous que Celui qui, selon la parole de saint Augustin, "est plus intime à nous-mêmes que nous-même" soit embarrassé pour faire jaillir en nous telle lumière qu' Il lui plaît, ou simplement pour dégager, à travers le mystérieux complexe de notre psychisme, telle pensée qu'il désire mettre en valeur ?

" Mais, dira-t-on, ne serait-ce pas là purement et simplement le fruit de l'imagination ? d'une sorte d'autosuggestion ? " Appliquons ici la règle du discernement des esprits. On juge d'un arbre à ses fruits. Si les idées qui vous viennent vous incitent à devenir plus humble, plus généreux dans le sacrifice, plus charitable envers ceux qui nous entourent, plus fidèle à votre devoir d'état, allez, rassurez-vous, l'Esprit de Dieu est là, qui peut d'ailleurs, nous l'avons laissé entendre, se servir, pour nous communiquer sa parole ineffable, du jeu normal des lois psychologiques dont Il est l'auteur.  (...)

" Mais précisément, dites-vous, je suis avant tout un homme (ou une femme) d'action, un esprit pratique, je ne suis pas du tout un mystique..."

Eh ! qui vous parle de mystique ! Croyez-vous d'abord que "mystique" s'oppose à "pratique" ? Personne n'a eu une vie mystique aussi profonde que la Sainte Vierge. Personne n'a été aussi pratique qu'elle. N'est-ce point elle qui, la première, à Cana, s'est aperçue que le vin allait manquer ? 

De même, n'est-ce pas Notre Seigneur qui, le premier, se préoccupa de nourrir les foules qui L'avaient suivi au désert ?

En vérité, puissiez-vous devenir un véritable mystique, c'est-à-dire une âme pour qui les réalités "cachées" ("mystique" vient d'un mot grec qui veut dire "caché") de la foi comptent pratiquement dans sa vie parce qu'elles sont devenues des réalités vécues. 

Tout chrétien est appelé à vivre de foi, et par conséquent à vivre d'une certaine vie mystique. Il n'est pas nécessaire de connaître la définition de la mystique pour en vivre, pas plus qu'il n'était nécessaire à M. Jourdain de connaître la définition de la prose pour en faire.

Précisément parce que vous êtes plongés dans l'action, vous avez besoin de venir de temps en temps passer un moment en tête à tête avec Celui qui est " la Voie, la Vérité et la Vie", source  de toute lumière et de toute fécondité.

Vous l'avez déjà certainement constaté vous-même : sans l'aide de Dieu, nous ne pouvons pas faire grand chose. Le naturel revient si vite au galop ! Nous sommes tentés d'agir plus sous l'influence des considérations humaines que par fidélité à un idéal, plus par égoïsme que par amour véritable, et la recherche subtile de nous-même se glisse à travers tout ce que nous faisons.

Rien de tel qu'une reprise de contact en profondeur avec Dieu pour nous remettre dans l'axe, voir les choses avec son regard, puiser auprès de Lui les lumières et les énergies en vue d'une nouvelle étape. Notre équilibre intérieur en bénéficiera et notre action aussi.

Auprès du Maître, on acquiert un sens plus nuancé des proportions de toutes choses, une clairvoyance étonnante pour résoudre les problèmes qui se posent à nous, une intuition plus fine du plan divin sur nous. On acquiert surtout ce sens de Dieu et ses exigences d'amour qui sont le secret du véritable sens de l'homme.

Ne l'oublions pas : un chrétien, ce n'est pas seulement celui qui pratique, qui va aux offices ; mais celui qui, dans toute sa vie, que ce soit sa vie de famille, de travail, de loisirs, de relations ou sa vie personnelle, s'efforce d'avoir dans la tête les idées de Jésus-Christ, dans le cœur les sentiments de Jésus-Christ, dans la volonté les réactions de Jésus-Christ.

Or, le proverbe est toujours vrai : " Dis-moi qui tu fréquentes, je te dirai qui tu es."

Il n'y a pas de moyen plus efficace pour acquérir les réflexes du Christ que d'entrer peu à peu dans son intimité et de Lui réserver, chaque fois que la chose est possible, un temps d'entretien suffisant pour entretenir la flamme.  Peu importe le nom que l'on donne à ces minutes fécondes ou à ces précieux instants : oraison, méditation, action de grâces, visite au Saint-Sacrement, heure sainte. Peu importe le lieu : une cathédrale, une modeste chapelle, un jardin, une forêt, ou tout simplement un coin de votre chambre. L'essentiel est de venir au Seigneur avec toute votre bonne volonté et, en toute humilité, de vous mettre entièrement "face à Lui".

Au début, laissez-vous conduire par ce modeste guide qui n'a d'autre prétention que de vous aider à orienter vos premiers pas. Vous trouverez ici exposées plusieurs méthodes. Prenez celle qui vous convient le mieux. Pour éviter la routine ou la fatigue, variez de temps en temps. Le rêve de l'auteur, c'est qu'assez tôt vous arriviez à vous passer de lui et à voler tout seul de vos propres ailes, à la rencontre ineffable du Seigneur. (...)

J'entends votre objection : " Nous n'avons pas le temps." Si l'oraison est un luxe, j'admets que dans vos vies surchargées par les besognes professionnelles et familiales il ne puisse y avoir place pour elle. Mais si prier est une nécessité vitale, comme de manger et de dormir, alors l'objection est absurde (...)  Au vrai ce n'est pas le temps qui vous manque, c'est la foi : si vous étiez convaincus de l'importance  de la prière, vous trouveriez un quart d'heure ou une demi-heure par jour. Parmi les soirées  employées à la lecture, aux travaux de la maison ou réservées à un film, à une visite, vous n'hésiteriez pas à en garder une pour la recherche de Dieu. Ce qui vous fait aussi défaut c'est le sens de l'effort : alors que vous avez consacré des années à vos études, alors que vous dépensez des sommes considérables de temps, d'imagination d'énergie pour développer vos affaires, vous "calez" dès qu'il s'agit de vous initier à la plus haute activité humaine : la prière. 

 

Extrait du livre : "Pour converser avec le Maître" de G. Courtois (Éditions Fleurus 1949)

 

 

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