Références scripturaires de la liturgie de ce dimanche : Ac 6, 1-7 - 1 P 2, 4-9 - Jn 14, 1-12
Texte (i-dessous) : P. Marie-Joseph Le Guillou, o.p. - L'Amour du Père révélé dans sa Parole, homélies année A - Éditeur : Parole et Silence, 1998
135 Nous habitons un monde de violence. Elle s'appuie sur le mensonge. Nous en sentons-nous responsables ? Vous savez combien le Christ insiste sur la liberté qui nous fait adhérer à la vérité : " Celui qui fait la vérité vient à la lumière " (Jn 3,21). Nous avons besoin de faire la vérité et de découvrir en même temps la violence qui est au fond de notre cœur. Ne nous trompons pas : nous sommes tous des violents à moins que la douceur du Christ ne vienne nous transformer et que l'Esprit Saint fasse de nos cœurs de pierre des cœurs de chair.
Aujourd'hui, le Christ nous dit : " Moi je suis le chemin, la vérité et la vie. Personne ne va au Père sans passer par moi ". Quelle parole étonnante et merveilleuse : c'est la parole de celui qui est innocent, qui participe du mystère du Père, de celui qui est à l'image de son Père et qui nous ouvre le chemin. Le Christ est le seul chemin : " Il n'y a pas sous le ciel d'autre nom donné aux hommes, par lequel nous devions être sauvés " nous disent les Actes des apôtres (4,12).
Si nous suivons celui qui est le chemin, nous choisirons le chemin de la vérité et de la vie. Le Seigneur pénètre nos vies et les bouleverse. Il fait de nous des êtres qui devront passer par la mort et la résurrection. Quelquefois, nous n'accordons pas toute sa valeur au texte de l’Évangile, quand Jésus-Christ nous dit : " Suis-moi " (Lc 5,27), " Si quelqu'un veut me suivre, qu'il prenne sa croix " (Lc 9,23). Des études récentes nous disent que tous les hommes et les apôtres en particulier pouvaient voir autour de Jérusalem des croix sur lesquelles les brigands ou les mauvais esclaves étaient crucifiés : ce ne sont donc pas des 136 paroles en l'air que les disciples appelés par Jésus entendent ! C'est cette voie-là que le Seigneur a choisie pour lui. Il s'est identifié à tous les pauvres, à toutes les victimes innocentes, et c'est pour cela qu'il nous révèle le Père et son amour : " Celui qui m'a vu a vu le Père. "
Nous avons à demeurer dans cet amour merveilleux que le Seigneur nous donne. C'est un amour qui brise nos faiblesses, qui panse nos blessures et les ouvre à l'amour du Père. C'est ainsi que se construit l’Église. Pierre nous dit : " Frères, allez vers le Seigneur Jésus : il est la pierre vivante que les hommes ont éliminée, mais que Dieu a choisie parce qu'il en connaît la valeur. Vous aussi, soyez les pierres vivantes qui servent à construire le temple spirituel, et vous serez le sacerdoce saint, présentant des offrandes spirituelles que Dieu pourra accepter à cause du Christ Jésus. " Il nous faut en prendre conscience pour annoncer les merveilles de celui qui nous a appelés des ténèbres à son admirable lumière. La foi nous demande de croire à cette lumière dans un monde de cruauté et de violence. Par contraste nous avons à être " doux et humbles de cœur ", semblables au Christ pauvre, humble, livré à l'amour de Dieu, livré pour tous les hommes. Il n'y a pas d'autre route : il est la voie et son chemin est notre chemin sur lequel il nous demande de marcher à sa suite.
Nous construisons le temple de Dieu en offrant des offrandes spirituelles, c'est-à-dire en nous offrant tout entiers dans le sacrifice du Christ pour qu'il fasse de nous de véritables offrandes au Père. Alors nous éliminerons la violence de nos vies, car ce qui doit être au cœur du chrétien, c'est la douceur. Être doux, humbles pour aimer toujours davantage, ce sont des vertus sur lesquelles les Pères de l’Église ont parlé ; elles sont capitales. Douceur infinie, compréhension infinie, pardon infini, charité dans la patience, dans l'ouverture aux autres.
Demandons au Seigneur de regarder son visage et de voir en transparence le visage du Père. Tout repose sur 137 cela. Le Père demeure dans le Christ, ses paroles, ses actes, ses œuvres sont celles du Père.
Demandons au Seigneur d'entrer dans ce mystère, que nous habitions ce mystère de demeure du Fils dans le Père et du Père dans le Fils. Nous sommes appelés à y communier ; c'est la douceur suprême, mais elle ne se conquiert que si l'on prend des épines dans ses mains et si on les serre avec amour : que le sang jaillisse, que l'amour jaillisse !
Demandons au Seigneur d'entrer dans ce mystère d'amour suprême du témoignage de l'innocence, de l'innocence apparemment vaincue par le mal mais qui triomphe dans la vérité de Dieu, dans la splendeur de Dieu. Amen !