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cana

  • l'oraison I

    Saint Thomas, lorsqu'il commente ce  passage dans son Commentaire sur l'Evangile de saint Jean, le fait en théologien contemplatif, c'est-à-dire en mettant toute sa rigueur doctrinale au service d'une lecture contemplative de l'Ecriture, pour en expliciter d'une manière ultime le sens "mystique". Le mystice de saint Thomas est difficile à bien comprendre, parce que nous ne sommes plus du tout habitués à un tel regard.

    Nous avons souvent perdu le sens mystique de l'Ecriture, alors que nous sommes très attentifs au sens littéral, même si, quelquefois, nous le comprenons très mal. Pour saint Thomas, le sens mystique, c'est justement le sens ultime, parce que la parole de Dieu est ordonnée à l'amour.

    Ce sens mystique est donc, d'une certaine manière, relatif à la finalité. Cela doit nous aider à comprendre ce que Cana doit être pour nous. Saint Thomas n'hésite pas à dire - et c'est sans doute la trouvaille d'un saint qui commente saint Jean - que les noces de Cana, prises d'une façon mystique, représentent le mystère de l'oraison, un mystère de rencontre avec Jésus. C'est très audacieux, de dire cela.

    La première chose que Jésus nous enseigne serait donc l'oraison. Il n'est alors pas étonnant que le premier moment de la vocation chrétienne (cf Jn 1,38-39)  soit de suivre "l'Agneau partout où il va" (Ap 14,4).

    Le mystère de l'oraison est le mystère des noces de notre âme avec Jésus. Il est peut-être bon de nous rappeler que, quand nous allons à l'oraison, nous allons à des noces. Alors, pas besoin d'attendre que la cloche sonne ! On y va "en toute hâte" (Cf Lc 1,39), puisque c'est un mystère de noces. "Au sens mystique, nous dit saint Thomas, les noces signifient l'union du Christ et de l'Eglise". Et l'oraison, mystère de noces, est la transformation de notre coeur dans le coeur du Christ. C'est, sous le souffle de l'Esprit Saint, l'exercice le plus divin de la charité, qui consiste à n'être plus qu'un avec Jésus, avec l'Agneau, avec son coeur.

    Si nous aimons, nous voulons aller tout de suite à l'essentiel ; et l'essentiel, c'est que notre coeur soit un avec le coeur de Jésus. Nous, nous apportons à l'oraison l'eau, notre bonne volonté, et Jésus la transforme. C'est lui qui réalise ce mystère d'unité parce que nous ne pouvons pas, par nous-mêmes, "faire oraison". Par nous-mêmes nous pouvons méditer, en bons serviteurs ; mais entrer dans l'oraison, vivre de l'oraison, nous ne le pouvons pas par nous-mêmes. Jésus  seul peut réaliser cela en nous. Cependant il demande notre bonne volonté, il demande que les jarres soient remplies d'eau "jusqu'au bord", c'est-à-dire que notre bonne volonté soit totale et que nous ayons le désir de tout remettre à Jésus. Il peut alors transformer notre bonne volonté en son amour.

    Comme c'est simple ! Mais aussi, quelle audace de la part du théologien, d'affirmer que le mystère de l'oraison est toujours un mystère de noces, les fiancailles de notre âme avec Jésus.

    (à suivre)

    M.D Philippe - Suivre l'Agneau t.II - Ed. St Paul 1999 / pp. 37-38 - ISBN : 2 85049 7819

  • Nous ne sommes pas arrivés au Septième Jour

    Les Noces de Cana (cf Jn 2, 1-12)

    (...) Commencer la liste des miracles par celui des noces n'est sans doute pas un hasard. D'autant plus que, vraissemblablement, Jean a choisi parmi une liste d'événements dont il avait connaissance et dont le nombre dépassait largement le chiffre 7. Mais ici, à Cana, la perspective est heureuse, enthousiasmante même. N'est-ce pas une façon pour Jean, à la suite de Jésus, de nous présenter la vie comme une noce ? Pour lui, il est fondamental de le comprendre si l'on veut interpréter la suite des paroles et des gestes de l'homme de Nazareth. Elle doit demeurer dans la tête du lecteur jusqu'au septième "miracle", la résurrection de Lazare, et j'ajouterais jusqu'à la scène du lavement des pieds lorsque, peu avant sa condamnation et sa mise en croix, Jésus rassemble lors d'un dernier repas tous ses disciples. En naissant, nous sommes invités au banquet de l'humanité, à la table de l'homme ! C'est dans la droite ligne de la tradition hébraïque : la vie est en création permanente, la création n'est pas encore achevée, nous ne sommes pas encore arrivés au septième jour, à nous d'y participer, de faire l'expérience de l'amour et de nous réaliser en tant qu'hommes. (...)

    Daniel Duigou - Psychanalyse des miracles du Christ - Presses de la Renaissance 2003, pp.44-45