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agrippa

  • Exigence de l'Evangile

    (...) Que l'Église ait des exigences, je pense qu'il n y a pas d'autre solution pour rappeler la fidélité à l'Évangile. La question est de savoir quelles sont les exigences qu'on met en avant. J'aurais envie de dire qu'une première exigence, avant toute exigence, est d'essayer de comprendre l'autre. La rencontre entre le Christ et la Samaritaine est toujours longuement citée et mise en avant. Ce n'est pas pour rien que ce texte a tellement d'impact aujourd'hui. Justement, Jésus exige très peu de choses. En fait, le Christ conduit cette femme à être face à elle-même et à la fin elle est complètement retournée. Ce sont des exigences qui permettent de retrouver quel est le fond de l'Évangile. Ce ne sont pas des exigences qui parlent de l'application d'une règle, mais elles portent sur ce qui est plus profond que la règle.

    A mon avis, l'exemple qui mériterait d'être médité, est celui de la femme adultère (Jn 8,1-11). Reparlons du contexte: le temple avait été fini par Hérode - ce qu'on oublie de dire car on oublie toujours les conditions sociales, c'est la morale qui compte! - et six mille prêtres s' étaient retrouvés au chômage. Alors le petit fils d'Hérode, Agrippa, avait fait daller tout le côté du temple. Ce travail occupait les prêtres chômeurs, seuls habilités à travailler dans enceinte du Temple. Il engageait des travaux d'état pour enrayer le chômage. Donc quand Jésus se penche, il écrit sur de la pierre, pas sur de la poussière. Or utiliser l'expression : " écrire du doigt sur de la pierre ", renvoie aux tables de la Loi (Ex 31,18). Puis arrive l' apostrophe célèbre: « Que celui qui est sans péché jette la première pierre. » À nouveau, Jésus se penche et écrit sans l'expression « du doigt ». Cette tournure se retrouve un peu plus loin dans l'Exode (Ex 32,16). Jésus est en train de mimer le don de la Loi. Et à l'usage des pharisiens. Pourquoi dit-il à cette femme: « Va et ne pèche plus» ? Parce qu'il a trouve une autre relation, il a trouvé une relation de pardon. Il lui a rappelé la réalité relationnelle du pardon, ce que la Loi était incapable de faire. La Loi était juste bonne à lancer des coups de pierre, à lapider. Si Dieu avait traité son peuple comme les pharisiens veulent traiter la femme, ils ne seraient pas là aujourd'hui pour l'accuser. Donc la première exigence de l'Évangile est celle du pardon. On ne peut pas poser une exigence à quelqu'un qu'on n'a pas compris, on ne peut pas poser une exigence à quelqu'un à qui on n'a pas ouvert une porte. Sinon, vous apprenez à conduire à des gens qui n'auront jamais de voiture. Ce n'est pas la peine.

    Albert Rouet - J'aimerais vous dire - Bayard 2009, pp. 238-239